Commentaires rédigés pour Halacha Yomit, par le Gaon Rabbi Zévadya COHEN Chlita,
chef des tribunaux rabbiniques de Tel Aviv
A la fin de notre Päracha, nous lirons le commandement du Tsitsit, et il est dit ainsi :
וַיֹּאמֶר ה' אֶל מֹשֶׁה לֵּאמֹר, דַּבֵּר אֶל בְּנֵי יִשְׂרָאֵל וְאָמַרְתָּ אֲלֵהֶם, וְעָשׂוּ לָהֶם צִיצִת עַל כַּנְפֵי בִגְדֵיהֶם לְדֹרֹתָם, וְנָתְנוּ עַל צִיצִת הַכָּנָף פְּתִיל תְּכֵלֶת, וְהָיָה לָכֶם לְצִיצִת, וּרְאִיתֶם אֹתוֹ, וּזְכַרְתֶּם אֶת כָּל מִצְוֹת ה' וַעֲשִׂיתֶם אֹתָם, וְלֹא תָתוּרוּ אַחֲרֵי לְבַבְכֶם וְאַחֲרֵי עֵינֵיכֶם אֲשֶׁר אַתֶּם זֹנִים אַחֲרֵיהֶם, לְמַעַן תִּזְכְּרוּ וַעֲשִׂיתֶם אֶת כָּל מִצְוֹתָי וִהְיִיתֶם קְדֹשִׁים לֵאלֹקֵיכֶם, אֲנִי ה' אֱלֹקֵיכֶם, אֲשֶׁר הוֹצֵאתִי אֶתְכֶם מֵאֶרֶץ מִצְרַיִם לִהְיוֹת לָכֶם לֵאלֹקִים, אֲנִי ה' אֱלֹקֵיכֶם. (במדבר טו-לח)
Hachem parla à Moché en ces termes : « Parle aux enfants d'Israël, et dis-leur de se faire des franges aux coins de leurs vêtements, dans toutes leurs générations, et d'ajouter à la frange de chaque coin un cordon d'azur. Cela formera pour vous des franges dont la vue vous rappellera tous les commandements d’Hachem, afin que vous les exécutiez et ne vous égariez pas à la suite de votre cœur et de vos yeux, qui vous entraînent à l'infidélité. Vous vous rappellerez ainsi et vous accomplirez tous mes commandements, et vous serez saints pour votre D.ieu. Je suis Hachem votre D.ieu, qui vous ai fait sortir du pays d'Egypte pour devenir votre D.ieu, moi, Hachem votre D.ieu. » (Bamidbar 15-38).
On peut s’interroger sur ces versets :
Pourquoi est-il dit « afin que vous ne vous égariez pas à la suite de votre cœur et de vos yeux » ? L’ordre devrait être inversé : Ce sont d’abord les yeux qui voient et ensuite le cœur convoite ensuite ! Le texte devait donc dire : « afin que vous ne vous égariez pas à la suite de vos yeux et de votre cœur » et non l’inverse !
Pour répondre, nous devons citer une terrible histoire :
Aux Etats-Unis, vivait un homme rescapé de la Shoah.
Après la guerre, il cessa d’observer la Torah et les Mitsvot.
Un jour, il rencontra le Roch Yéchiva de Brisk.
Le Rav lui demanda :
« Un homme comme toi, qui a grandi en observant la Torah et les Mitsvot, pourquoi as-tu cessé de les observer ?? Comment as-tu pu abandonner toute l’éducation dans laquelle tu as grandi, et devenir un juif sans Torah et Mitsvot ??! »
L’homme éclata en sanglots et répondit qu’à la vue d’une situation qui s’est produite dans le camp pendant la Shoah, il décida d’arrêter d’observer les Mitsvot ! »
L’homme poursuivit et raconta au Rav :
« Dans le camp, il y avait des milliers d’hommes qui vivaient dans une grande famine et qui subissaient un travail harassant du matin jusqu’au soir. Un jour, un nouveau déporté juif arriva au camp, et il possédait un petit Siddour de Téfila (un petit livre de prières).
Immédiatement, une queue géante composée des déportés juifs du camp se formait tous les jours, afin de voir le Siddour et d’y lire quelques passages de prière. Mais à ma grande stupéfaction, le propriétaire du Siddour réclama de chaque déporté la moitié de sa misérable ration quotidienne de pain en échange du droit de consulter le Siddour. Et il en fut ainsi ! Chacun donnait la moitié de sa misérable ration de pain, et pouvait ainsi prier dans le Siddour !
Lorsque j’ai vu cela, j’ai été pris de dégout ! Depuis ce jour, j’ai pris la décision de cesser l’observance des Mitsvot ! Comment un homme est-il disposé à exploiter la misère et la souffrance de ses propres frères ?! Leur prendre la moitié de leur misérable ration de pain pour une prière dans un Siddour ?! Je me suis dit à cette époque : Si c’est cela la religion, elle ne m’intéresse pas ! »
En entendant cette réponse, le Rav dit à l’homme :
« Pourquoi vois-tu avec tes yeux uniquement cet homme et son comportement, ce qui t’amène à tirer des conclusion à long terme ? Pourquoi ne vois-tu pas en cet évènement des centaines d’hommes qui ont fait la queue, et qui étaient prêts à donner leur misérable portion de pain pour une prière dans ce vieux Siddour ?!
C’est cela que tu dois voir ! C’est d’eux que tu dois apprendre le sacrifice pour la Torah et pour la prière en toute situation et à tout âge ! »
L’homme entendit et éclata en sanglots. Il s’excusa et revint sur sa décision.
Cette histoire nous apprend que deux personnes, dont les valeurs sont différentes, peuvent voir le même événement, mais chacun verra la chose avec un regard différent selon les penchants de son cœur.
Comme dit le proverbe bien connu : « Un demi verre d’eau, on peut le voir à moitié plein comme à moitié vide. »
Tout dépend de la nature et des penchants du cœur de celui qui voit.
A la lueur de tout cela, nous comprenons le sens du verset :
« Afin que vous ne vous égariez pas à la suite de votre cœur et de vos yeux ».
En effet, le penchant du cœur définit ce que l’homme verra, le bien ou le mal de la chose.
C’est pourquoi, la Torah nous met en garde :
Ne laisse pas ton cœur te faire pencher vers le négatif, car tout ce que tu verras, tu l’expliqueras avec un regard négatif !
Tu dois apprendre la morale, travailler tes traits de caractère, t’éloigner d’une mauvaise compagnie, « Sois le dernier des lions et jamais le premier des renards » (Pirké Avot). Fixe des moments pour étudier la Torah, accomplis les Mitsvot d’Hachem !
Alors, tu mériteras les derniers mots de ces versets :
« Vous accomplirez tous mes commandements, et vous serez saints pour votre D.ieu. »
Pour chaque regard positif, nous aurons le mérite de recevoir la sainteté et nous n’accomplirons que de bonnes actions, Amen !
Chabbat Chalom !