Date de la Halacha: 16 Tevet 5785 16 janvier 2025
Il est rapporté dans le livre de Chémouel I (chap.1) que ‘Hanna la femme d’Elkana n’avait pas d’enfants. Lorsqu’elle se rendit en pèlerinage au Michkan qui se trouvait à cette époque dans la ville de Chilo, ‘Hanna pleura avec toute l’amertume de son cœur et formula un vœu selon lequel, si on lui accorde un enfant, elle le consacrera au service d’Hachem, comme le texte l’explique sur place.
En terminant sa prière, elle reçut la bénédiction de ‘Eli Ha-Cohen qui était aussi le Grand de la génération, et il lui souhaita qu’Hachem exauce les demandes de son cœur. Quelque temps plus tard, elle tomba enceinte et enfanta un garçon qu’elle nomma Chémouel, « car c’est d’Hachem qu’elle le demanda ».
Il devint plus tard le prophète Chémouel.
Il est également dit dans un verset de ce chapitre au sujet de la prière que ‘Hanna adressa à Hachem :
וְחַנָּה, הִיא מְדַבֶּרֶת עַל-לִבָּהּ--רַק שְׂפָתֶיהָ נָּעוֹת, וְקוֹלָהּ לֹא יִשָּׁמֵעַ. (שמואל א א-יג)
« ‘Hanna parlait à son cœur, seules ses lèvres bougeaient, mais on n’entendait pas sa voix. » (Chémouel I 1-13)
Il est enseigné dans la Guémara Béra’hot (31a) :
Rav Haménouna dit : Nous pouvons apprendre de nombreuses et importantes règles à partir de ces versets au sujet de ‘Hanna.
« ‘Hanna parlait à son cœur, seules ses lèvres bougeaient… » : Nous apprenons d’ici que celui qui prit doit prononcer avec ses lèvres, ce qui signifie qu’il ne doit pas se contenter de prier mentalement, mais seulement en articulant véritablement la prière.
« …on n’entendait pas sa voix. » : A partir de là, nous apprenons que celui qui prit la ‘Amida ne doit pas faire entendre sa voix. On enseigne dans une Baraïta : Celui qui fait entendre sa voix (lors de la ‘Amida), fait partie des gens qui ont très peu de foi en Hachem, car il exprime ainsi qu’Hachem n’entend pas (‘Hass Vechalom) la prière dite à voix basse. Celui qui fait entendre sa voix dans sa prière, se comporte comme les faux prophètes, au sujet desquels il est écrit :
וַיִּקְרְאוּ, בְּקוֹל גָּדוֹל ... (מלכים א יח-כח)
« Ils implorèrent à haute voix. » (Livre des Rois I chap.18-28)
Selon certains décisionnaires, lorsque Rav Haménouna enseigne qu’il ne faut pas faire entendre sa voix lors de la ‘Amida. Cela signifie qu’il ne faut absolument pas faire entendre sa voix, même pas à soi-même.
Malgré cela, notre Talmud (Bavli) ainsi que le Talmud Yérouchalmi prouvent que l’interdiction ne concerne que le fait de faire entendre sa voix à d’autres personnes présentes, mais il n’y a pas d’interdiction à celui qui prit de faire entendre sa voix à lui-même.
D’ailleurs le TOUR écrit qu’il est même préférable que celui qui prit entende ce qu’il dit, afin de mieux se concentrer.
C’est aussi ce qu’écrit le RAMBAM en ces termes :
On ne doit pas prier mentalement, mais seulement en prononçant avec les lèvres et en se faisant entendre à voix basse ce que l’on dit, sans faire entende sa voix (à d’autres). C’est également ainsi que tranche le RACHBA en disant que Lé’hate’hila (à priori), il est une Mitsva de s’entendre lors de la prière. C’est également ainsi que tranche MARAN dans le Choul’han ‘Arou’h.
Notre maître le Rav Ovadia YOSSEF z.ts.l s’est longuement étendu sur ce sujet du point de vue de la Halacha et de la pratique, et il conclut que l’on doit Lé’hate’hila (à priori) s’entendre lorsque l’on prit, comme nous l’avons expliqué.
(Même si dans son livre Bédek Ha-Baït, MARAN écrit qu’il semble selon le Zohar Ha-Kadoch qu’il est plus juste de ne pas s’entendre lors de la prière, malgré tout, l’essentiel à retenir selon la Halacha est ce qu’il a écrit dans son livre Choul’han ‘Arou’h qui fut rédigé après le Bédek Ha-Baït. MARAN est donc revenu sur son opinion initiale et tranche qu’il faut s’entendre dans la prière, car il constata que le Zohar Ha-Kadoch selon qui il ne faut pas s’entendre lors de la prière, n’était pas obligatoirement interprétable dans ce sens. Halichot ‘Olam vol.1 page 158.
C’est également ce qui ressort des propos de la Guémara Yoma 73a, au sujet de celui qui consultait les « Ourim et Toumim », il devait faire entendre sa voix au Cohen « comme l’a fait ‘Hanna lors de sa prière ». Ce qui signifie que selon notre Talmud, on doit entendre sa voix lors de la prière. Voir la référence citée.
C’est ainsi qu’agissait le Gaon Rabbi Ben Tsion ABBA CHAOUL z.ts.l, il faisait en sorte de s’entendre correctement lors de sa prière).
En conclusion : Il faut prier la ‘Amida à voix basse, en entendant ce que l’on dit.
A ce propos, notre maître le Rav Ovadia YOSSEF z.ts.l commenta ce qui est dit dans la Torah (dans la Paracha de Vaéra que nous lirons la semaine prochaine avec l’aide d’Hachem) au sujet de la plaie des grenouilles, où il est dit :
וַיֵּצֵא מֹשֶׁה וְאַהֲרֹן, מֵעִם פַּרְעֹה; וַיִּצְעַק מֹשֶׁה אֶל-ה', עַל-דְּבַר הַצְפַרְדְּעִים אֲשֶׁר-שָׂם לְפַרְעֹה.
(שמות ח-ח)
« Moché et Aharon sortirent de chez Pharaon. Moché cria vers Hachem, en raison des grenouilles qu’il avait envoyées à Pharaon. » (Chémot 8-8)
On peut se demander :
Pourquoi il n’est pas dit dans toutes les autres plaies que Moché « cria », alors que c’est le cas pour la plaie des grenouilles ?
Notre maître le Rav z.ts.l répondit ainsi :
La Halacha exige de celui qui prie, d’entendre ce qu’il dit à voix basse.
Mais les grenouilles coassaient tellement fort que Moché ne pouvait pas s’entendre prier ….. Et c’est pour cela qu’il eut besoin de crier, afin d’entendre ce qu’il disait dans sa prière. (cette explication est citée dans le livre « Chiv’hé Omer » page 81).