Question : La vérification des Téfilin et des Mézouzot au mois d’Elloul est-elle une obligation ou une simple mesure de piété (Midat ‘Hassidout) ?
Réponse : Voici les propos du RAMBAM (Chap.2 des lois relatives aux Téfilin, Halacha 11) :
Celui qui écrit les parchemins des Téfilin de sa propre main, ou qu’il les achète d’un expert, ou de tout autre homme, dès lors où il les vérifie (ou les fait vérifier) avant de les placer dans leurs habitacles, il n’est plus nécessaire de les vérifier une autre fois, même après plusieurs années, et on ne craint pas qu’une lettre se soit effacée ou percée. Hillel l’Ancien disait, en désignant ses propres Téfilin : « Ils appartenaient au père de ma mère ! » Fin de citation du RAMBAM
Cela signifie que même Hillel l’Ancien portait les Téfilin de son grand père, puisqu’ils gardent leur présomption de Cacherout (‘Hezkat Cacherout).
Selon le RAMBAM, il n’y aurait donc pas d’obligation de donner ses Téfilin à vérifier, dès lors où - après avoir été rédigés - ils ont été vérifiés avant d’être introduits dans les Batim (les habitacles).
Le livre Ore’hot ‘Haïm (l’un des décisionnaires de l’époque médiévale) rapporte qu’il y a une divergence d’opinion Halachique parmi les Tanaïm (les Sages de la Michna) sur l’obligation de donner à vérifier les Téfilin, après plusieurs années.
En effet, certains parmi les Tanaïm penseraient (visiblement, par opposition à Hillel) qu’il faut les donner à vérifier une fois par an.
Le Ore’hot ‘haïm écrit justement sur cela :
« J’ai entendu dire que les Sages de France ont l’usage de les vérifier une fois par an. Cependant, j’ai trouvé parmi les Responsas (correspondance Halachique entretenue entre divers autorités Rabbiniques) des Guéonim que lorsqu’on met toujours la même paire de Téfilin tous les jours, il n’est pas nécessaire de les vérifier, même après 50 ans, puisqu’ils sont toujours en contact avec l’air, et les parchemins ne risquent pas de moisir à l’intérieur. Mais si l’on ne met pas toujours la même paire de Téfilin, ils nécessitent une vérification, et c’est d’ailleurs ce que nous avons entendu au sujet de Sages et d’Anciens, qu’il faut les vérifier (seulement) 2 fois en 7 ans.»
Fin de citation du Ore’hot ‘Haïm
Nous avons donc 3 opinions sur le sujet :
Vérification uniquement après la rédaction (RAMBAM)
Vérification 1 fois par an (le Ore’hot ‘Haïm et les Sages de France, en s’appuyant sur l’opinion de certains Tanaïm,)
Vérification tous les 3 ans ½ si l’on ne met pas toujours la même paire (les Guéonim)
Selon cela, nous qui – en général - mettons tous les jours les même Téfilin, selon le Din, nous n’avons pas besoin de les donner à vérifier.
C’est d’ailleurs ainsi que tranche MARAN dans le Choul’han Arou’h (O.H chap.39 parag.10)
Par contre, la Mézouza qui elle, reste constamment accrochée au mur, nous sommes tenus de la donner à vérifier tous les 3 ans ½.
Mais attention !
Certains décisionnaires écrivent que de nos jours, il est très fréquent de trouver des Téfilin devenus Péssoulot (non valables) à cause de la sueur qui - en s’introduisant à l’intérieur des Batim (habitacles) - détériore les lettres du parchemin.
C’est pour cela qu’il est juste et convenable de donner également les Téfilin à vérifier tous les 3 ans ½.
Selon cela, notre maître le Rav Ovadia YOSSEF z.ts.l écrit que malheureusement de notre époque, de nombreux Sofrim (scribes qui rédigent les Sifré Torah, Téfilin et Mézouzot) ne sont pas assez expérimentés dans toutes les règles relatives à la rédaction des Téfilin et des Mézouzot, et il arrive souvent de constater que les Téfilin qu’ils ont écrits sont Péssoulot au niveau de leurs lettres.
Il est donc souhaitable de s’imposer la ‘Houmra (la rigueur) de les donner à vérifier au mois de Eloul.
Pour les Mézouzot, il faut être encore plus rigoureux, pour la raison citée plus haut.
Toutefois, selon le strict Din, il n’est pas nécessaire de donner les Téfilin à vérifier plus d’une fois tous les 3 ans ½.
C’est également ainsi que tranche notre maître le Gaon et Richon LéTsion Rabbi Its’hak YOSSEF Chlita dans son livre Yalkout Yossef (chap.39).
Le Gaon et Richon LéTsion Rabbi David YOSSEF Chlita s’est lui aussi longuement étendu sur ce point dans son livre Halacha Béroura (chap.39), et a conclu ainsi sur le plan pratique.
Lorsque notre maître le Rav z.ts.l était jeune, il s’est un jour rendu dans une des synagogues de rite irakien à Jérusalem en compagnie du Gaon Rabbi Na’im ELIYAHOU z.ts.l (le frère du Gaon Rabbi Mordé’haï ELIYAHOU z.ts.l), et ils reçurent de nombreuses personnes qui leur amenèrent leurs Téfilin.
De nombreuses paires de Téfilin furent trouvées Péssoulot (invalides), et c’est ainsi qu’ils démontrèrent à l’assemblée l’état de leurs Téfilin. Ils les sauvèrent ainsi de la négligence de cette précieuse Mitsva (et de la récitation d’une bénédiction en vain).
A la lueur de tout cela, il faut que certaines personnes prennent conscience, lorsqu’elles achètent des nouveaux Téfilin ou des nouvelles Mézouzot, de les acheter uniquement chez une personne réputée pour sa Ir’at Chamaïm (sa crainte d’Hachem), reconnu pour son travail, et qui bénéficie de l’appui de véritables Talmidé ‘Ha’hamim (d’érudits dans la Torah), car si le Sofer (le scribe) n’a pas d’Ir’at Chamaïm, les Téfilin et les Mézouzot qu’il écrit (ou qu’il vend) sont forcément totalement Péssoulot, puisque l’une des règles les plus capitales dans la rédaction de Téfilin ou de Mézouzot est l’obligation pour le Sofer de se concentrer et de purifier sa pensée à chaque fois qu’il écrit le Nom d’Hachem.
Si ce Sofer n’a pas d’Ir’at Shamaïm dans son cœur, il est certain qu’il ne fera pas attention à ce point.
D’autre part, les règles dans ce domaine sont très nombreuses et très complexes, et elles nécessitent une parfaite maîtrise que - bien souvent et malheureusement - le Sofer ne possède pas, comme l’expérience l’a prouvé.
Il arrive parfois pendant la rédaction des Téfilin ou des Mézouzot, que le Sofer commet une erreur d’écriture irréparable selon la Halacha, et le fait d’abandonner la rédaction de ces Téfilin ou Mézouzot pour en recommencer d’autres, lui occasionne une perte d’argent considérable. Et bien malheureusement, certains Soferim réparent illégalement la faute d’écriture qu’ils ont commis, sans que personne ne s’aperçoive de quoi que ce soit !
C’est pour cela qu’avant d’acheter des Téfilin ou des Mézouzot, il faut absolument prendre conseil auprès d’un Talmid ‘Ha’ham (un érudit dans la Torah), afin de ne pas prendre le risque de n’avoir jamais accompli la Mitsva de Téfilin ou de la Mézouza.