Date de la Halacha: 18 Iyar 5785 16 mai 2025
(Commentaires rédigés par le Rav David PITOUN, pour Halacha Yomit)
Le début de notre Paracha traite des règles concernant les Cohanim, comme l’interdiction de l’impureté mortuaire pour un Cohen ; les femmes avec lesquelles un Cohen est autorisé à se marier ; la Sainteté d’un Cohen ; le châtiment prévu par la Torah pour la fille d’un Cohen qui se livre à la débauche….
קְדֹשִׁים יִהְיוּ, לֵאלֹקיהֶם, וְלֹא יְחַלְּלוּ, שֵׁם אֱלֹקיהֶם: כִּי אֶת-אִשֵּׁי ה' לֶחֶם אֱלֹקיהֶם, הֵם מַקְרִיבִם--וְהָיוּ קֹדֶשׁ. (ויקרא כא-ו)
Ils seront saints pour leur D., et ne profaneront pas le Nom de leur D., car ce sont eux qui offrent les sacrifices d’Hachem, ainsi que le pain consacré à leur D., et ils seront saints. » (Vaykra chap.21 – 6, début de notre Paracha)
Nous constatons une répétition apparemment non-indispensable dans ces versets :
« Ils seront saints pour leur D. », puis de nouveau à la fin du verset « et ils seront saints »
Dans son livre Vayomer Avraham, le Gaon Rabbi Avraham Morde’haï PATAL (Ha-Lévy) z.ts.l (beau-père de notre grand maître le Rav Ovadia YOSSEF z.ts.l) cite une Halacha tranchée dans le Choul’han ‘Arou’h par le RAMA (O.H.128-45) :
Il est interdit de se servir d’un Cohen, même de notre époque, car cela est considéré comme porter atteinte aux choses sacrées du Beit Ha-Mikdach (le Temple), sauf si le Cohen pardonne (autorise) le fait que l’on se serve de lui.
Selon cette Halacha, il est interdit de demander un service quelconque à un Cohen, sans obtenir de lui au préalable, son pardon sur le fait qu’on lui demande ce service.
L’auteur du Touré Zahav (le TaZ) commente (ibid. note 39) :
On raconte qu’un jour, un Cohen versa de l’eau sur les mains de Rabbenou Tam.
Un élève présent, fit la remarque :
« Pourtant il est enseigné dans le Talmud Yéroushalmi qu’il est interdit de se servir d’un Cohen ? »
Rabbenou Tam répondit :
« De notre époque, les Cohanim ne possèdent plus de sainteté, car selon la règle, s’ils portent sur eux les habits sacerdotaux, ils possèdent la sainteté ; s’ils ne portent pas les habits sacerdotaux, ils ne possèdent plus la sainteté. »
L’élève rétorqua :
« Si c’est ainsi, il ne faut plus leur accorder de sainteté dans le moindre domaine (il n’est plus nécessaire que le Cohen soit appelé en premier à la Torah, il est donc autorisé à se rendre impur pour un mort…) ?! »
Rabbenou Tam se tut.
Le TAZ explique que la raison du silence de Rabbenou Tam ne signifie pas qu’il ignorait la réponse, mais seulement qu’il ne voulait pas prendre la réputation d’un Talmid ‘Ha’ham (un érudit dans la Torah) à qui il est permis de se servir d’un Cohen, car le Cohen tire une satisfaction d’un tel service.
Tout ceci veut dire que lorsque le Cohen ne retire aucune satisfaction du service qu’on lui demande, il est interdit de se servir de lui, même s’il l’autorise.
Par déduction, lorsque le Cohen tire satisfaction du service qu’on lui demande, il est permis de se servir de lui, après lui avoir demander pardon.
Grâce à cela, les commentateurs expliquent ce qui est rapporté dans la Guemara Bava Metsi’a (85b) :
Le Prophète Eliyahou avait l’habitude de rendre visite à Rabbenou Ha-Kadoch (Rabbi Yéhouda Ha-Nassi).
Un jour de Roch ‘Hodech, le Prophète Eliyahou tarda à venir.
Lorsqu’il arriva, Rabbenou Ha-Kadoch lui dit :
« Pourquoi as-tu tardé aujourd’hui ? »
Le Prophète Eliyahou lui répondit :
« Car j’ai dû aller laver les mains de Avraham Avinou, et il a fallu ensuite que j’attende qu’il finisse sa prière et qu’il aille se recoucher. De même pour Its’hak, de même pour Ya’akov. »
Or, on peut poser la question:
Le Prophète Eliyahou n’était-il pas Cohen (d’après la tradition, Eliyahou Ha-Navi et Pine’hass sont la même personne) ?! Comment les Avot (les Patriarches) ont-ils pu se servir de lui ?!
Mais à la lueur de ce que l’on a dit au nom du Touré Zahav, cette question n’a pas lieu d’être.
En effet, il est certain que le Prophète Eliyahou retira une certaine satisfaction du fait de servir les Patriarches du Monde (Avraham, Its’hak et Ya’akov), et c’est pourquoi, les Patriarches étaient autorisés à se servir de lui.
Nous comprenons mieux la répétition qui apparaît dans notre verset :
Ils seront saints pour leur D. Ils servent Hachem.
Mais leur sainteté n’est peut-être existante que lorsqu’ils portent les habits sacerdotaux ? Le texte répond : et ils seront saints. Ils seront saints de par eux même, même en l’absence des habits sacerdotaux.
Il est donc interdit de se servir d’un Cohen, sauf lorsqu’il en retire lui aussi une satisfaction, comme dans l’histoire avec Rabbenou Tam, citée plus haut.
Chabbat Chalom !