Date de la Halacha: 9 Tishrei 5785 11 octobre 2024
Commentaires rédigés par le Rav David PITOUN, pour Halacha Yomit,
extraits de l’introduction du Yalkout Yossef-Yamim Noraïm
Le RAMBAM écrit (chap.3 des règles relatives au repentir, règle 3) :
Au même titre que l’on pèse les mérites et les fautes de l’homme au moment où il quitte ce monde, ainsi chaque année, on pèse les fautes de chaque créature du monde le jour de Roch Ha-Chana. Celui qui est déclaré Tsaddik (juste) est immédiatement scellé pour la vie. Celui qui est déclaré impie est immédiatement scellé pour la mort. Celui qui est déclaré « moyen » (« Bénoni ») reste en suspens jusqu’à Yom Kippour. S’il s’est repenti, il sera scellé pour la vie, sinon il sera scellé pour la mort. Fin de citation.
Les propos du RAMBAM prennent leur source dans la Guémara Roch Ha-Chana 16b :
Rabbi Kérouspédaï dit au nom de Rabbi Yo’hanan : 3 livres sont ouverts le jour de Roch Ha-Chana : le livre des Tsaddikim (justes) ; le livres de Récha’im (impies) ; le livre des Bénonim (moyens). Les gens totalement Tsaddikim (majorité de mérites) sont inscrits et scellés immédiatement pour la vie ; les gens totalement impies (majorité de fautes) sont inscrits et scellés immédiatement pour la mort ; les gens Béninim (moitié, moitié) restent en suspens depuis Roch Ha-Chana jusqu’à Yom Kippour : s’ils sont méritants (s’ils se sont repentis à Yom Kippour), ils seront inscrits et scellés pour la vie, sinon ils seront inscrits et scellés pour la mort.
Le Lé’hem Michné pose une question sur cette enseignement :
Si le Bénoni (moyen) ne s’est toujours pas repenti à Yom Kippour, pourquoi est-il malgré tout scellé pour la mort ? Ses actes ont pourtant une proportion de 50 50, et Hachem est qualifié de « Rav ‘Hessed » (d’une grande bonté) dans les 13 attributs de la miséricorde divine. Or, nos maîtres enseignent dans la Guémara Roch Ha-Chana (17a) qu’Hachem, dans sa grande bonté, fait pencher vers le bien le jugement de ceux dont la proportion des actes est justement de 50 50 !
Selon cela, le Bénoni devrait être scellé pour la vie, dans le doute !
Mais le Lé’hem Michné répond à sa propre question :
Le fait que le Bénoni ne s’est toujours pas repenti à Yom Kippour, constitue une faute supplémentaire sur ses autres fautes, car durant les 10 jours de repentir, il a le devoir et l’obligation de se repentir.
Dans ce cas, ses actes n’ont plus une proportion de 50 50, car il possède maintenant une majorité de fautes.
Le livre Ko’hvé Or ajoute que refuser de se repentir durant la période la plus propice à cela, lorsqu’Hachem Lui-même se trouve au plus près de l’homme (« Appelez Le lorsqu’il est proche ») constitue une faute terriblement grave, qu’aucune Mitsva ne pourrait contrebalancer.
Le Péné Yéhochoua’ pose lui aussi une question :
Pourquoi le livre des gens qualifiés de « Bénonim » (moyens) sont-ils ouverts le jour de Roch Ha-Chana, alors que leur sort ne sera décidé qu’à Yom Kippour ?
Avant de répondre à cette question, nous devons définir les notions de « livre de la vie » et « livre de la mort ».
En effet, le RACHBA explique que les notions de vie et de mort indiquées ici ne représentent pas réellement la vie et la mort comme on pourrait les comprendre.
Il s’agit ici – selon le RACHBA – des avantages et des désagréments de ce monde.
Il est vrai qu’il existe des Récha’im qui jouissent de certains avantages dans ce monde, et également des Tsaddikim qui souffrent malgré leur droiture
(Voir Kohelet 8-14 ; Iyov 2-9 et 10 ; Téhilim 94-3).
En réalité, il existe des Mitsvot dont on peut consommer les fruits dans ce monde ci, (Comme enseigné dans la Michna Péa chap.1 Michna 1 : le respect des parents ; la pratique du bien envers autrui ; la visite aux malades ; l’hospitalité ; faire régner la paix entre un homme et son prochain ou entre deux époux ; mais l’étude de la Torah dépassent toutes ces Mitsvot) ainsi que des fautes pour lesquelles on peut subir un châtiment également dans ce monde ci.
Les Récha’im – qui ont une majorité de fautes – ont forcément accompli quelques Mitsvot dont les fruits sont consommés dans ce monde.
Hachem décide de faire jouir ces Récha’im dans ce monde ci, des fruits de leurs quelques Mitsvot accomplies, comme la Torah le prévoit :
וּמְשַׁלֵּם לְשֹׂנְאָיו אֶל-פָּנָיו, לְהַאֲבִידוֹ: לֹא יְאַחֵר לְשֹׂנְאוֹ, אֶל-פָּנָיו יְשַׁלֶּם-לוֹ. (דברים ז-י)
Mais Il rétribue ses ennemis directement, pour les faire périr, et n'ajourne point, à l'égard de son contempteur, le paiement qui lui est dû. (Dévarim 7-10)
Selon cela, le Racha’ (impie) dont il est question le jour de Roch Ha-Chana (majorité de fautes), qui est immédiatement inscrit et scellé pour la « mort », se verra subir les désagréments de ce monde, parce qu’il ne possède aucune de ces Mitsvot pour lesquelles il est possible d’en consommer les fruits dans ce monde ci.
S’il possède quelques-unes de ces Mitsvot, même s’il est un Racha’ total (majorité de fautes), il jouira de certains avantages dans ce monde ci.
Il en est de même pour le Tsaddik dont il est question le jour de Roch Ha-Chana (majorité de mérites), qui est immédiatement inscrit et scellé pour la « vie ».
Il ne connaîtra que des avantages dans ce monde, parce qu’il ne possède pas la moindre faute pour laquelle il est possible de subir un châtiment dans ce monde ci.
S’il possède l’une de ces fautes, même s’il est un Tsaddik total, Hachem lui enverra des épreuves et des souffrances dans ce monde ci, afin de lui conserver intégralement la récompense qui l’attend dans le Monde Futur pour ses Mitsvot.
Fin de citation du RACHBA.
Le RAMBAN (cité par le Hagahot Maïmoniyot) explique lui aussi les choses dans ce sens.
Pour répondre à la question du Péné Yahochoua’ (Pourquoi ouvrir le livre des Bénonim le jour de Roch Ha-Chana, alors que leur sort n’est décidé qu’à Yom Kippour ?), le Gaon et Tsaddik Rabbi ‘Haïm Leïb CHMOULEWITZ Ha-Lévy z.ts.l explique que lorsque nos maîtres nous enseignent que « les Bénonim restent en suspens jusqu’à Yom Kippour », cela signifie que leur sort est réellement décidé le jour de Roch Ha-Chana, mais cela est comparable à un homme qui est condamné à être pendu. On lui passe la corde autour au cou, et on le fait monter sur une chaise.
Il ne reste plus qu’à enlever la chaise pour qu’il soit pendu.
Ainsi, Hachem condamne les Bénonim à mort dès Roch Hachana (car il faut une majorité de mérites pour obtenir une sentence de vie dans ce monde ci, et ils n’ont que « 50 50 »). Mais Hachem – dans sa grande bonté – attend Yom Kippour pour « enlever la chaise », car le Bénoni peut finalement se repentir.
Que tous les Bénonim que nous sommes puissent trouver le chemin du repentir et ainsi, mériter une sentence de vie à Yom Kippour, une vie pleine de bénédiction, de santé et de réussite spirituelle et matérielle, Amen.
Kétiva Va’-Hatima Tova Bé-Séfer ‘Haïm Tovim !
Tizkou Léchanim Rabbot Né’imot Vétovot !
Chabbat Chalom !