Date de la Halacha: 23 Cheshvan 5786 14 novembre 2025
Commentaires rédigés par le Rav David PITOUN, pour Halacha Yomit
La personnalité d’Eli’ezer, selon les explications citées par le Mé’am Lo’ez
Contexte : Sentant la fin de sa vie approcher, Avraham Avinou confie une mission à son fidèle serviteur Eli’ezer. Il lui demande de se rendre à ‘Haran – pays natal d’Avraham – afin de choisir une digne épouse pour son fils Its’hak, parmi les filles de la famille d’Avraham.
Après avoir fixé certaines conditions avec son serviteur, Avraham l’envoie, accompagné d’hommes et de cadeaux.
La Paracha nous relate dans le détail l’arrivée d’Eli’ezer à ‘Haran, ainsi que la prière qu’il adresse à Hachem afin qu’il couronne sa mission de succès, en lui indiquant facilement la fille qui serait assez digne pour épouser le fils de son maître.
Nous voyons également comment le texte nous décrit la réalisation complète et immédiate de la demande faite par Eli’ezer à Hachem.
Rivka – la fille de Bétouel – est envoyée par Hachem à Eli’ezer.
En la voyant, il lui demande si elle peut l’abreuver, ainsi que les hommes qui l’accompagnent. Elle lui répond qu’elle puisera de l’eau pour lui et ses hommes, ainsi que pour ses chameaux. Ainsi, Eli’ezer sait qu’elle est la future digne épouse de Its’hak, le fils de son maître Avraham, car elle possède la qualité du ‘Héssed (la bonté), spécificité d’Avraham Avinou.
Il lui demande s’il peut passer la nuit chez ses parents. Elle lui répond que la chose est possible et elle le mène auprès de ses parents.
Lorsqu’Eli’ezer arrive au foyer de Bétouel et qu’il lui raconte le but de son voyage et son déroulement, le texte s’étend sur le récit d’Eli’ezer.
Les versets nous relatent de nouveau tous les détails déjà mentionnés dans les versets précédents, le but du voyage d’Eli’ezer, son arrivée à ‘Haran, ainsi que la prière qu’il adresse à Hachem, et sa demande à Rivka de l’abreuver lui et ses hommes. Ils nous décrivent encore une fois la réalisation complète et immédiate de la demande faite par Eli’ezer à Hachem.
וַיֹּאמֶר אַבְרָהָם, אֶל-עַבְדּוֹ זְקַן בֵּיתוֹ, הַמֹּשֵׁל, בְּכָל-אֲשֶׁר-לוֹ: שִׂים-נָא יָדְךָ, תַּחַת יְרֵכִי. וְאַשְׁבִּיעֲךָ—בַּה' אֱלֹקי הַשָּׁמַיִם, וֵאלֹקי הָאָרֶץ: אֲשֶׁר לֹא-תִקַּח אִשָּׁה, לִבְנִי, מִבְּנוֹת הַכְּנַעֲנִי, אֲשֶׁר אָנֹכִי יוֹשֵׁב בְּקִרְבּוֹ. כִּי אֶל-אַרְצִי וְאֶל-מוֹלַדְתִּי, תֵּלֵךְ; וְלָקַחְתָּ אִשָּׁה, לִבְנִי לְיִצְחָק. (בראשית כד-ב, ג, ד)
Avraham dit à son serviteur, le doyen de sa maison, qui gérait tout ce qu’il possédait : « Place ta main sous ma hanche. Je te demande de me jurer par Hachem qui est le D. du ciel et le D. de la terre, que tu ne choisiras pas une femme pour mon fils, parmi les filles de Kena’an où je réside. Tu iras seulement vers ma terre d’origine, dans le lieu où je suis né, et c’est là que tu choisiras une épouse pour mon fils Its’hak. » (Bérechit 24-2, 3 et 4)
Pour s’assurer qu’Eli’ezer ne prendra pas une fille de Kena’an, Avraham lui fait prêter serment.
Lorsqu’Avraham fut sauvé miraculeusement de la fournaise, le roi Nimrod lui donna Eli’ezer comme serviteur.
Selon le Pirké Dé-Ribbi Eli’ezer, Eli’ezer n’est autre que le fils du roi Nimrod.
Le Midrach Rabba explique qu’Eli’ezer était un très grand sage puisqu’il apprenait tout de son maître Avraham, et il entretenait ses connaissances en les prodiguant aux autres.
Le verset cité précédemment précise qu’Eli’ezer était pour Avraham celui « qui gérait tout ce qu’il possédait ».
Or, il est difficilement concevable qu’Avraham ait confié la gestion de tous ses biens à un simple serviteur !
Mais en réalité, il faut comprendre ce verset différemment :
Eli’ezer avait la capacité de gérer, de maîtriser le Yétser Ha-Ra’
qu’il possédait en lui !!
Cette force exceptionnelle pour un simple serviteur, lui a procuré le moyen de s’élever au rang de « ‘Hassid », un homme qui s’illustre par sa piété.
En signe de cet extraordinaire travail de la personnalité, Eli’ezer avait les même traits de visage qu’Avraham !
Le Kéli Yakar donne encore une autre explication de ce verset :
Lorsqu’une personne court sans arrêt après sa richesse matérielle et ne pense qu’à cela, nous pouvons dire de cette personne que sa richesse règne sur elle, mais elle ne règne pas sur sa richesse, car cette attirance pour l’argent l’entraîne à toutes sortes de fautes, comme le faux serment, l’escroquerie, le vol et des milliers d’autres transgressions. Cette personne ne prie pas tel que l’ordonne Hachem car elle court tellement après l’argent qu’elle ne connait plus les heures des prières !!
Par contre, lorsqu’une personne craint véritablement Hachem, elle se réjouit de sa part et ne transgresse pas la Torah pour gagner davantage d’argent.
Elle aime donner la Tsédaka aux nécessiteux.
Nous pouvons dire de cette personne qu’elle règne véritablement sur sa richesse et sa richesse ne règne pas sur elle !!
Nous pourrions nous demander : comment Avraham plaça toute sa confiance en Eli’ezer ? Ne pouvait-il pas tromper son maître en lui amenant une femme indigne de son fils Its’hak, dans le but de gagner quelque pièces d’argent que lui aurait proposé un quelconque prêtre idolâtre pour marier sa fille ?!
C’est pourquoi le texte nous apprend : Sache qu’Eli’ezer était un homme respectable car il « …gérait tout ce qu’il possédait » et ne faisait pas partie de cette catégorie de gens qui se laissent gérer par leur richesse matérielle ou leur cupidité, et transgressent sans scrupules les lois de la Torah simplement pour l’appât du gain !
Un homme comme Eli’ezer mérite donc toute la confiance d’Avraham Avinou.
Je me permets d’ajouter les paroles d’un très ancien Piyout (poème liturgique) :
מָתַי יְבוּשַׂר עַם,
où il est dit :
עֲשׅׄירׅים מְפוּזַרְים, עוֹבְדִים לְעוֹבְדֵיהֶם ...
« Les riches dépensiers servent leurs serviteurs… »
Ce qui signifie qu’au lieu de laisser l’argent les servir, ils s’asservissent eux-mêmes à leur argent !!!
Chabbat Chalom !