Le fondement de la règle du changement d’endroit au milieu d’un repas
On enseigne dans la Guémara Péssa’him (101b) que toute personne qui a changé d’endroit pendant sa consommation, c'est-à-dire, lorsqu’une personne se trouvait dans un endroit et qu’elle sort de celui-ci pour se rendre à un autre endroit afin d’y poursuivre son repas, cette personne est tenue de réciter de nouveau la bénédiction sur sa consommation.
On explique dans la Guémara, qu’il ne s’agit là que d’un déplacement d’une maison à une autre, mais d’un endroit à l’autre, on ne récite pas de nouveau la bénédiction sur les aliments.
De façon évidente, lorsqu’on se déplace véritablement d’une maison à une autre, par exemple, une personne qui se trouve au milieu de son repas, et qui va rendre visite à son voisin, si elle doit poursuivre son repas chez son voisin, il est évident qu’elle doit de nouveau réciter la bénédiction de Ha-Motsi, mais une personne qui reste dans la même maison, mais qui se déplace simplement d’un endroit à l’autre, ne doit pas réciter de nouveau la bénédiction.
Que signifie « d’une maison à l’autre » ?
Cependant, nos maîtres les Richonim (décisionnaires de l’époque médiévale) discutent du véritable sens qu’il faut accorder aux propos de la Guémara. Est-ce que « d’un endroit à l’autre » signifie qu’il est permis de passer – au milieu du repas – même d’une pièce à l’autre dans la même maison, ou bien faut-il plutôt interpréter « d’un endroit à l’autre » dans le sens où l’on a uniquement le droit de changer d’endroit dans la même pièce.
Passer d’un endroit à l’autre dans une grande salle
De façon unanime, concernant la règle de « Chinouï Makom » lors du repas, si l’on a changé d’endroit dans la même pièce, on ne récite pas de nouveau les bénédictions sur ce que l’on mange, tant que l’on est en mesure de voir l’endroit initial. Même si l’on ne peut pas voir l’endroit initial à cause de la présence d’une armoire ou autre qui cache la vision, on considère également comme si l’on voyait l’endroit initial.
Il en est de même s’il s’agit d’une très grande salle de réception, tant que l’on voit encore l’endroit initial, il n’y a pas de problème de Chinouï Makom.
Il est même permis Lé’haté’hila (à priori) de passer d’un endroit à l’autre dans la même pièce lors du repas, car ce n’est pas considéré comme Chinouï Makom.
Passer dans une autre pièce ou dans un autre appartement dans le même immeuble
Si l’on désire passer d’une pièce à l’autre dans la même maison, ou bien d’un étage à un autre dans la même maison, on n’est pas autorisé à le faire Lé’haté’hila (à priori), puisque certains décisionnaires considèrent que la notion de Chinouï Makom existe même d’une pièce à l’autre, tout comme d’une maison à l’autre, où nous sommes tenus de réciter de nouveau la bénédiction.
Malgré tout, si Bédia’vad (à posteriori), on a changé de pièce, on ne récite pas de nouveau la bénédiction, car nous avons un grand principe selon lequel « lorsqu’il y a un doute (ou une divergence d’opinion Halachique) sur la récitation d’une bénédiction, on va à la souplesse et on ne la récite pas » (Safek Béra’hott Léhakel), et selon certains de nos maîtres les Richonim, on ne doit pas réciter de nouveau la bénédiction lorsqu’on est passé d’une pièce à une autre. Il faut donc prendre en considération leurs propos et ne pas réciter de nouveau la bénédiction.
Il en est de même lorsqu’on change d’endroit d’un appartement vers celui d’un ami dans le même immeuble, il est également interdit Lé’haté’hila de le faire, mais si malgré tout on est passé d’un appartement à un autre pour poursuivre le repas, Bédia’vad on ne récite pas de nouveau la bénédiction, car selon certains, le Din de passer d’une pièce à l’autre est le même que celui de passer d’un appartement à l’autre dans le même immeuble.
Nuance entre passer d’un appartement à un autre et passer d’une pièce à une autre
Cependant, il y a quand même une nuance Halachique entre le cas de celui qui passe d’une pièce à l’autre dans la même maison, et celui qui passe d’un appartement à l’autre dans le même immeuble, car si on a préalablement – au moment où l’on récite la bénédiction de Ha-Motsi – l’intention de poursuivre le repas dans une autre pièce dans la même maison, il est permis Lé’haté’hila (à priori) de le faire, par contre, d’un appartement à l’autre dans le même immeuble, même si l’on a préalablement l’intention de poursuivre le repas chez un ami qui habite l’immeuble, il est interdit de le faire Lé’haté’hila.
Si l’on est passé d’une maison à l’autre au milieu du repas, et que les deux maisons ne font pas parti d’une seule, mais de deux constructions distinctes, il est certain que dans ce cas on est tenu de réciter de nouveau la bénédiction de Ha-Motsi au début du repas que l’on consomme dans la deuxième maison, car il est expliqué dans la Guémara citée précédemment, que le déplacement d’une maison à l’autre est considéré comme une interruption, et qu’on est tenu de réciter de nouveau la bénédiction.
En conclusion : Il est permis de passer d’un endroit de la pièce à l’autre pendant un repas, mais d’une pièce à l’autre, il est interdit Lé’haté’hila de le faire au milieu du repas. Si l’on est passé d’une pièce à l’autre, on ne récite pas de nouveau la bénédiction, car selon certains, n’est considérée comme une interruption dans le repas, uniquement lorsqu’on va d’une maison à l’autre. Malgré tout, si on avait préalablement l’intention de passer dans l’autre pièce dans la même maison, il est permis de passer dans l’autre pièce, même Lé’haté’hila.
Si l’on est passé d’un appartement à l’autre dans le même immeuble, dans ce cas aussi on ne récite pas de nouveau la bénédiction, mais il est interdit de le faire Lé’haté’hila, même si l’on avait préalablement l’intention de poursuivre le repas dans l’autre appartement. Si l’on est passé véritablement dans une autre maison, et que les deux maisons ne font pas parti d’une seule, mais de deux constructions distinctes, on récite de nouveau la bénédiction, car on s’est interrompu dans le repas, selon tous les avis de la Halacha.
Dans la prochaine Halacha, nous expliquerons – avec l’aide d’Hachem – à quel type de consommation s’applique la règle de « changement d’endroit ».