Nous avons déjà eu l’occasion d’expliquer - au sujet des bénédictions alimentaires que nous récitons avant de consommer, comme la bénédiction de « Chéhakol » ou celle de « Mézonot » - que la bénédiction initiale d’un aliment n’est liée à aucune quantité, ce qui signifie que lorsqu’on consomme un aliment, on doit toujours réciter la bénédiction initiale sur ce que l’on consomme, par exemple lorsqu’on boit ne serait ce qu’une goutte d’eau où l’on doit réciter la bénédiction de « Chéhakol » sur cette consommation. Et de même pour tous les autres cas similaires. Ceci étant donné qu’il est interdit de tirer profit de ce monde sans bénédiction, car même lorsqu’il s’agit d’une infime consommation, il y a profit.
Ce n’est que pour la bénédiction finale ou le Birkat Ha-Mazon, qu’il est nécessaire d’avoir consommé une quantité minimale de Kazaït (environ 27 g), comme nous l’avons expliqué. Mais la bénédiction initiale est récitée dans tous les cas.
Il est enseigné dans la Guémara Béra’hot (14a) :
La dégustation ne nécessite aucune bénédiction.
Ce qui signifie que lorsqu’on consomme quelque chose, pas dans l’intention de se nourrir ou de tirer profit, mais seulement pour goûter et vérifier s’il ne manque pas des épices ou autre, on ne récite pas de bénédiction avant de consommer. Ce n’est que lorsqu’on consomme plus de Revi’it (8,1 cl), qu’il est nécessaire de réciter au préalable la bénédiction sur l’aliment même si l’on ne désirait que le goûter, car il est inconcevable que l’on prenne une quantité aussi importante sans avoir l’intention de se nourrir, puisqu’une telle quantité n’est pas indispensable lorsqu’on veut seulement goûter l’aliment.
Nos maîtres les Richonim (décisionnaires de l’époque médiévale) discutent sur la définition exacte du Din de la dégustation qui ne nécessite pas de bénédiction.
Selon l’opinion de Rabbenou ‘Hanan’el, on n’est exempt de bénédiction qu’à la condition que l’on n’avale pas ce que l’on met dans la bouche et que l’on recrache immédiatement après avoir goûté.
Mais selon l’opinion du RAMBAM, même si l’on avale ce que l’on goûte, tant que l’on n’a pas l’intention de se nourrir de cet aliment et qu’on le goûte uniquement pour en vérifier l’assaisonnement où le goût, on ne doit pas réciter la bénédiction au préalable, car nos maîtres n’ont institué de bénédiction que pour un aliment qu’on mange et dont on tire satisfaction avec l’intention véritable de consommer, et non de goûter uniquement.
Du point de vue de la Halacha, MARAN écrit dans le Beit Yossef qu’étant donné que l’opinion du RIF est a même que celle du RAMBAM sur ce point, et aussi parce que nous nous trouvons face à une situation de « Safek Bera’hot » (un doute sur une bénédiction), puisque selon l’opinion des décisionnaires selon lesquels on ne doit pas réciter de bénédiction lorsqu’on goûte un aliment, celui qui récite malgré tout une bénédiction dans une telle situation récite une bénédiction en vain.
Par conséquent, MARAN tranche selon l’opinion du RAMBAM selon qui, même si l’on avale une partie de l’aliment goûté, puisque l’on n’a pas d’intention de se nourrir et de tirer profit, on ne doit pas réciter de bénédiction sur ce que l’on goûte.
C’est ainsi qu’il tranche aussi dans le Choul’han ‘Arou’h.
Notre grand maître le Rav Ovadia YOSSEF z.ts.l rapporte que d’autres décisionnaires médiévaux se rangent à l’opinion de Rabbenou ‘Hanan’el sur ce point, par exemple le RACHBETS (Rabbenou Chim’on Bar Tséma’h), ainsi que le TACHBETS qui explique qu’en réalité le RAMBAM pense également ainsi, et selon lui, ce n’est que lorsqu’on n’avale pas l’aliment et qu’on le recrache immédiatement, que l’on ne doit pas réciter de bénédiction initiale. C’est ainsi que tranchent de nombreux autres Richonim (décisionnaires médiévaux).
Malgré tout, du point de vue de la Halacha, il est certain que nous devons trancher selon l’opinion du Choul’han ‘Arou’h, puisque nous avons un grand principe selon lequel : « Safek Bera’hot Léhakel » (lors d’un doute ou d’une divergence d’opinion Halachique sur une bénédiction, on ne la récite pas).
Cependant, afin de s’acquitter selon tous les avis, il est juste de s’imposer la ‘Houmra (rigueur) lorsqu’on goûte un aliment et qu’on avale, d’avoir la pensée de tirer également profit de l’aliment en tant que nourriture, et dans ces conditions, on est autorisé à réciter la bénédiction sur ce que l’on désire goûter, car dans ce cas on pense également à une satisfaction, et sous cette condition, on s’écarte de toute crainte de consommation sans bénédiction.
En conclusion : Lorsqu’on goûte un plat ou un aliment ou une boisson seulement dans l’intention d’en vérifier le goût et non d’en tirer profit, on ne doit pas réciter de bénédiction sur ce que l’on goûte (sauf si l’on goûte une partie qui fait une quantité d’au moins 8.1 cl). Malgré tout, il est préférable de penser au moment où l’on goûte, que l’on désire aussi tirer profit, et dans ces conditions, on pourra réciter la bénédiction sur ce que l’on goûte, en s’acquittant de son devoir selon tous les avis.