Lorsqu’un juif constate que son prochain commet une transgression, il a le devoir selon le Din, de lui faire la réprimande et la remarque sur ses actes.
Cependant, il faut veiller à dire les choses sous une forme acceptable pour l’autre, car sinon, on perd tout l’intérêt de la réprimande.
En effet, la Torah ordonne : « Tu feras la réprimande à ton prochain, et tu ne porteras pas sur lui la faute ». Cela signifie que l’on doit faire la réprimande à son prochain lorsqu’on sait qu’il transgresse un interdit de la Torah.
Ce devoir a pour raison principale le fait d’écarter le pêcheur de sa faute, et l’entrainer vers le repentir sur ses actes. C’est pourquoi, lorsqu’on voit son prochain se montrer négligeant sur un point obligatoire, par exemple le fait d’ouvrir les yeux pendant la ‘Amida (il est interdit d’ouvrir les yeux lorsqu’on dit la ‘Amida, sauf pour regarder le Siddour), il ne faut pas venir le trouver subitement et le réprimander violement sur ses actes. Il faut venir le trouver un peu après, et lui dire « naïvement » : « C’est incroyable ! (faire comme ci on découvre nous même la chose) Regarde ce que je viens de découvrir dans les propos des décisionnaires ! Qu’il est interdit d’ouvrir les yeux pendant la ‘Amida ! Regarde toi-même. »
De cette façon, on peut espérer que l’autre va retenir la leçon et accepter les propos de celui qui réprimande, puisqu’il ne lui a montré aucune animosité, et ne lui a au contraire exprimé que de l’intérêt.
Il est dit dans le livre de Michlé (chap.9) : « Ne fais pas réprimande au moqueur car il te haïrait, réprimande plutôt le sage et il t’aimera. »
Cela signifie que lorsqu’il s’agit d’une personne qui ne fait que se moquer de la Torah, il n’y a absolument aucune raison de lui faire la réprimande, car cette réprimande dégraderait davantage son état, puisqu’il trouverait une occasion de plus pour médire sur celui qui le réprimande, ainsi que sur ses propos.
Par contre, lorsqu’on réprimande un homme intelligent, cet homme va comprendre immédiatement que l’autre ne lui veut aucun mal, et ne désire au contraire que son bien. Il acceptera donc ses propos avec enthousiasme.
Le Tana Dévé Eliyahou explique que lorsque la Torah a ordonné « Tu feras la réprimande à ton prochain », cela vient exclure celui qui n’est pas considéré véritablement comme « ton prochain ». Quelle catégorie d’individus cela vient-il exclure ? Les moqueurs, les sots et les impies, pour lesquels il n’y a pas de devoir de les réprimander. Comme il est dit également (Michlé chap.23) : « Ne parle pas aux oreilles du sot », car le sot, de part sa sottise, est aussi très têtu, et n’est pas disposé à accepter la vérité de la bouche de celui qui la dit, puisqu’il manque totalement d’ouverture pour écouter son prochain. Le sot n’ouvre pas les yeux pour savoir si son prochain a raison.
De nombreux décisionnaires écrivent explicitement que s’il s’agit d’un juif véritablement Racha’ (impie), qui marche volontairement dans le mauvais chemin et de façon provocatrice, il n’y a absolument pas à lui faire de remontrance, car il n’est pas considéré comme « ton prochain ». C’est ainsi que tranchent le Michna Béroura (début du chap.608) et d’autres. (voir aussi Yabiya’ Omer tome 2 sect. O.H chap.15).
Nous apprenons de là qu’il n’y aucune raison de crier à l’encontre des personnes qui profanent Chabbat en public, en se déplaçant en voiture pendant Chabbat, car le fait de crier « Chabbat ! Chabbat ! » à leur encontre, ne constitue absolument pas la Mitsva de réprimande, aussi bien parce qu’ils ne comprennent pas les propos de celui qui crie, aussi bien à cause du fait que ces gens ont été éduqués dans un chemin qui n’est pas le bon, et de ce fait, ils n’ont pas pris conscience de la gravité de la profanation du Chabbat.
A fortiori s’il s’agit de gens biens, mais qui hélas s’obstinent à profaner le Chabbat en se déplaçant en voiture pendant Chabbat, il est certain qu’il n’y a pas de devoir de les réprimander, comme nous l’avons expliqué.
Ainsi, notre maitre le Rav z.ts.l enseignait toujours dans ses différents cours de Torah qu’il ne sert à rien de crier « Chabbess (Chabbat) ! Chabbess ! (comme le font certains ‘Hassidim en Israël) » à l’encontre de ceux qui se déplacent en voiture pendant Chabbat, car la personne qui se déplace en voiture n’est absolument pas en mesure de comprendre l’esprit de cette frome de réprimande, au contraire, cette réaction ne pourra engendrer que de la haine dans son cœur envers ceux qui le réprimandent.
Notre maitre le Rav z.ts. citait à ce sujet les propos de MAHARACH EL GAZI z.ts.l dans son livre Mé’ouléfett Sapirim, où il stipule qu’il n’y a pas d’interdiction de flatter un impie lorsqu’on a l’intention de le rapprocher de la Torah, et il ne faut à fortiori pas le réprimander de façon virulente, car de cette réprimande ne naîtra que de l’éloignement.
Un jour de Chabbat, notre maitre le Rav z.ts.l marchait en compagnie de l’un de ses fils, quand soudain une voiture s’arrêta à côté d’eux et le conducteur (juif) leur demanda : « Excusez-moi, comment arrive-t-on à tel endroit s’il vous plait ? »
Le fils de notre maitre le Rav z.ts.l – constatant l’effronterie du conducteur qui pose une telle question au Rav le jour de Chabbat – s’irrita intérieurement et répondit au conducteur : « Continue tout droit, ensuite tourne à gauche et encore à gauche et tu arriveras directement au Guéhinam (en enfer) ! »
Lorsque notre maitre le Ravz.ts.l entendit, il en tenu rigueur à son fils et lui dit:
« Ce n’est pas ainsi qu’il faut se comporter ! Il faut réprimander de manière agréable et par des moyens doux ! »
Dans le livre Avir Ha-Ro’im volume 2, nous avons cité d’autres propos de notre maitre le Rav z.ts.l sur ce sujet, ainsi que la bonne attitude avec laquelle il a rapproché des milliers de juifs à la sainte Torah, toujours avec beaucoup de tact et par des gestes d’amour.
Cependant, il existe des manières pour protester contre eux, comme nous l’expliquerons dans la suite.