Dvar Torah pour vendredi 12 Elul 5785 5 septembre 2025

Ki Tétsé – « Ne sois pas Tsaddik à l’excès » (Kohelet 7-16)

Commentaires rédigés par le Rav David PITOUN, pour Halacha Yomit
D’après le livre Ménou’hatam Kavod du Gaon Rabbi David PENYA Chlita

לֹא-תִרְאֶה אֶת-חֲמוֹר אָחִיךָ אוֹ שׁוֹרוֹ, נֹפְלִים בַּדֶּרֶךְ, וְהִתְעַלַּמְתָּ, מֵהֶם: הָקֵם תָּקִים, עִמּוֹ. (דברים כב-ד)
Tu ne dois pas voir l'âne ou le bœuf de ton frère s'abattre sur la voie publique et te dérober à eux: tu es tenu de les relever avec lui. (Dévarim 22-4)

La Torah nous présente l’un de ses 613 commandements, qui consiste à aider son prochain, lorsque la charge de son animal tombe. Nous avons le devoir de l’aider à remonter la charge sur l’animal.

Dans la Paracha de Michpatim, la Torah nous présente un devoir similaire, avec quelques nuances :
כִּי-תִרְאֶה חֲמוֹר שֹׂנַאֲךָ, רֹבֵץ תַּחַת מַשָּׂאוֹ, וְחָדַלְתָּ, מֵעֲזֹב לוֹ--עָזֹב תַּעֲזֹב, עִמּו. (שמות כג-ה)

Si tu vois l'âne de ton ennemi succomber sous sa charge, garde toi de l'abandonner; aide-lui au contraire à le décharger. (Chémot 23-5)

Ici, il ne s’agit pas de l’animal d’un ami, mais de celui d’un ennemi, qui s’écroule sous le poids de sa charge. Nous avons le devoir d’aider l’ennemi à soulager l’animal en lui retirant la surcharge.

Nous constatons que pour le devoir d’aider à remonter la charge sur l’animal, la Torah nous parle de l’animal d’un ami, alors que pour le devoir d’aider à soulager l’animal de sa surcharge, la Torah nous parle de l’animal d’un ennemi.

Le livre Tossett Béra’ha explique que chacune des deux situations possède un point spécifique.

En effet, un animal en surcharge est un animal en souffrance, et le fait d’épargner une souffrance à un animal est un Din et une totale obligation de la Torah, comme expliqué dans la Guémara Bava Métsi’a (32b).
La Torah vient donc nous enseigné que même s’il s’agit de ton ennemi, tu as le devoir d’agir et de l’aider à soulager son animal de sa surcharge.
Si ce n’est pas pour ton ennemi, tu dois le faire parce que tu dois accomplir le devoir de ne pas laisser souffrir un animal.
Et cet acte doit être gratuit, puisqu’il s’agit d’accomplir le devoir de la Torah de ne pas laisser un animal souffrir. 

Mais lorsqu’il s’agit d’aider quelqu’un à seulement remettre une charge sur l’animal, tu es en droit de demander une rétribution, car cette situation ne provoque aucune souffrance à l’animal.
La Torah vient donc nous enseigner que lorsqu’il s’agit de remonter la charge sur l’animal, même s’il s’agit de ton ami, tu es en droit de lui demander une rétribution pour cet acte.

La Guémara (ibid.) pose le problème à l’inverse :
Comment agir lorsque se présentent à moi la décharge de l’animal de mon ami, et le remontage de la charge sur l’animal de mon ennemi ?!
La Guémara répond : Je dois aider mon ennemi à remonter la charge sur son animal, « afin de soumettre mon Yétser Ha-Ra’ (mauvais penchant) », même si l’animal de mon ami souffre d’une surcharge et qu’il y a là un devoir de la Torah d’épargner la souffrance à un animal.

Question : Comment peut-on transgresser un devoir de la Torah (laisser souffrir un animal) seulement dans le but de « soumettre son Yétser Ha-ra’ » ?!

Le Gaon Rabbi Aharon KOTLER z.ts.l répond (Michnat Rabbi Aharon vol.1 page 219) :
Le fait de donner priorité au remontage de la charge sur l’animal de l’ennemi et non à la décharge de l’animal de l’ami malgré la souffrance de l’animal, contient un très grand fondement :
L’amélioration des Middot (qualité humaines) pour le futur !   

En effet, si l’individu s’habitue à marcher selon les directives de son mauvais penchant, en s’abstenant d’aider son ennemi à remonter la charge de son animal parce qu’il s’agit de son ennemi, il est susceptible d’en arriver à transgresser de très graves fautes et de s’écarter du droit chemin.

Même si le seul objectif d’agir pour l’avenir ne constituerait pas une raison valable de repousser l’accomplissement d’un devoir de la Torah (épargner la souffrance à l’animal de l’ami) - puisque ce devoir est « au présent », alors que le travail des Middot est « au futur », et que les Middot peuvent être améliorées par d’autres éléments et non uniquement par cet acte – nous apprenons malgré tout que soumettre le Yétser Ha-Ra’ constitue un devoir en lui-même, et ce devoir est si sévère qu’il repousse un autre devoir de la Torah : celui d’épargner la souffrance à un animal !

Chabbat Chalom !