Dvar Torah pour vendredi 10 Tevet 5784 22 décembre 2023

Vaygach

Nous sommes aujourd’hui à la date du 10 Tévet, jour de jeûne public
pour tout le peuple d’Israël.
Vous pouvez consulter les règles relatives à un jour de jeûne ici,
dans une Halacha antérieure consacrée au jeûne du 17 Tamouz

Commentaires rédigés par le Gaon Rabbi Ya’akov SASSON Chlita, directeur de notre site Halacha Yomit,
et digne petit-fils de notre maître le Rav Ovadia YOSSEF z.ts.l

Nous lisons dans notre Paracha le dévoilement de Yossef à ses frères, lorsqu’il leur dit :
« Je suis Yossef ! Mon père est-il encore en vie ? »
Ses frères – pris d’une grande panique – ne purent lui répondre quoi que ce soit, comme le texte nous dit : « Ses frères ne purent lui répondre, car ils furent pris de panique devant lui. »

Le livre Torat ‘Héssed nous fait part du grand étonnement qui apparaît dans toute l’histoire de Yossef et ses frères :

En effet, il est enseigné dans plusieurs Midrachim de nos maîtres que les frères de Yossef ont regretté de l’avoir vendu. C’est pourquoi, avant de se rendre en Egypte, ils s’engagèrent tous à le racheter à n’importe quel prix qu’on leur exigerait. Ils pénétrèrent en Egypte par 10 portes différentes, et ils le cherchèrent durant 3 jours, dans l’espoir de le trouver.
En conséquence à cela, lorsque Yossef les accusa d’espionnage, ils comprirent que leur comportement était celui d’espions.

Mais on peut s’interroger :
Comment est-il possible que les saints Chévatim n’ont envisagé à aucun moment que « Tsafenat Pa’néa’h » - le vice-roi d’Egypte qui se trouve face à eux – est leur frère Yossef ?!
Même en admettant qu’ils ne l’ont pas envisagé pour des raisons physiques - parce que Yossef les a quittés avant que sa barbe ne pousse et qu’il porte aujourd’hui une barbe - cela reste encore étonnant, car ils ont mené une longue conversation avec lui, et son visage est resté le même, sa voix est restée la même ! Comment se fait-il qu’aucun d’entre eux n’a envisagé qu’il s’agit de Yossef lui-même ?!

Cette interrogation pend davantage d’ampleur lorsque nous méditons un peu plus sur cette Paracha :

Nos maîtres enseignent que lorsque Yossef ordonna que l’on emprisonne Yéhouda, 70 colosses d’Egypte essayèrent de s’emparer de lui, mais Yéhouda les maîtrisa tous avec une force miraculeuse spécifique aux enfants de Ya’akov. Yossef demanda donc à son propre fils Ménaché d’emprisonner Yéhouda.

Ménaché fils de Yossef donna un seul coup à Yéhouda et l’emprisonna. Il l’enchaîna avec des chaînes de fer. Lorsque Yéhouda reçu le coup de Ménaché, il dit : « Ce coup ne peut être que celui d’un membre de la maison de mon père ! » (Comme pour dire : « Celui-là est de chez nous … ») Yéhouda a donc descellé qu’un tel coup - donné avec une force surnaturelle - ne peut provenir d’un égyptien, mais uniquement de l’un des membres de leur famille.

Comment les frères de Yossef n’ont-ils pas envisagé que ce n’est autre que leur propre frère Yossef qui se tient face à eux ?!

De plus, dans la suite de la Paracha, Yossef (toujours en leur cachant sa véritable identité) dit à ses frères : « Je crains D.ieu ! »
Pas une seule personne dans tout le pays d’Egypte ne craignait le Ciel, ne craignait Hachem ! et voilà que le vice-roi de ce pays leur dit explicitement qu’il est comme eux, qu’il craint D.ieu !
De nouveau, comment ses frères n’ont pas descellé qu’il s’agissait en réalité de Yossef ?!
De même, Yossef préoccupe les Chévatim sans cesse, avec toutes sortes de phénomènes qui n’ont aucune explication, il sait tout sur eux, en prétextant que sa coupe (dans laquelle il boit) lui dévoile des secrets, et malgré tout cela, les frères n’envisagent aucunement qu’il s’agit de leur frère Yossef ?!

Le Or Ha-‘Haïm Ha-Kadoch - Rabbénou ‘Haïm BEN ‘ATAR - explique tout ceci dans son livre Or Ha-‘Haïm (sur Mikets) :
Il était évident pour les frères de Yossef – qui ont vendu leur frère à cause de ses rêves – que leur grand malheur n’avait pour cause que Yossef lui-même. Ils le considéraient comme seul coupable de tout ce qui était en train de leur arrivé, à cause de ses rêves futiles, selon lesquels il allait devenir roi et où ses frères se prosterneraient à lui.
C’est pourquoi, les frères ne pouvaient absolument pas envisager que ces rêves se réaliseraient, et que le roi qui se tient devant eux - et devant lequel ils se prosternent - n’est autre que Yossef !
Ils ne pouvaient pas non plus envisager que les rêves étaient réellement authentiques, car cela entraînerait le fait que la vente était illégale et qu’ils sont les véritables coupables de tout ce qui leur arrive, à eux comme à leur père !
Cette pensée ne pouvait tout simplement pas leur traverser l’esprit !

Comme le dit le Or Ha-’Haïm Ha-Kadoch dans ses propres termes :
« Parce qu’ils virent Yossef au sommet des niveaux, ils éloignèrent de leur cœur une telle pensée. »

Même si nous n’avons pas la plus petite idée du niveau spirituel et des pensées véritables des saints Chévatim, nous pouvons malgré tout tirer une grande morale de tout cela :

Lorsqu’un homme est immergé dans le naturel, immergé dans ses passions, immergé dans toutes sortes de conceptions et idéologies différentes, non seulement il ne peut pas mériter de reconnaitre la vérité, mais de plus, même lorsque la vérité brille comme le soleil face à lui, il la recouvre et il dit : « Non, ce n’est pas le soleil ! »

On raconte au sujet du Gaon et Tsaddik Rabbi Eliyahou DESLER z.ts.l que des gens discutaient un jour en sa présence d’une guerre qui venait d’éclater dans le monde.
Ces gens dirent entre eux : « Il est vrai que tout est Min Hachamïm (tout est dirigé par D.ieu), cependant, parlons malgré tout au niveau naturel. Comment tel pays peut-il gagner tel pays ? »
Rav DESLER leur répondit : « Votre conversation est comparable à deux personnes qui disent : « Nous savons que la vérité est ainsi, mais malgré tout, parlons comme des débiles ! »

Nous devons dépasser les conventions que nous nous sommes fixé nous-mêmes.
Nous devons être ouverts, nous devons cesser d’être ancrés dans « nos vérités », et disposés à accepter la vérité et le reproche de celui qui nous les dit.
Qu’Hachem nous donne le mérite d’accomplir Sa volonté conformément à Sa volonté, afin de Le servir avec un cœur sincère.

Chabbat Chalom