Dvar Torah pour vendredi 26 Cheshvan 5784 10 novembre 2023

‘Hayé Sarah - Le mariage

Commentaires rédigés par le Gaon Rabbi Ya’akov SASSON Chlita –
directeur de notre site Halacha Yomit et petit-fils de notre maître le Rav Ovadia YOSSEF z.ts.l

A la fin de la précédente Paracha (Vayéra), après l’épisode de la ‘Akédat Its’hak (ligature de Its’hak qui devait initialement être offert en sacrifice), il est dit :
« Après cet événement, Avraham reçut les nouvelles suivantes : Milka, elle aussi, a donné des enfants à Na’hor ton frère : … Yidlaf et Bétouel. Lequel Bétouel a engendré Rivka … » (Béréchit 22-20 à 22).
Cela signifie qu’au retour de la ‘Akédat Its’hak, Avraham apprend que son frère Na’hor a eu un fils qui est Bétouel, et que ce même Bétouel a eu une fille du nom de Rivka.

Nos maîtres expliquent dans le Midrach (cité par Rachi) que lorsqu’Avraham revient de la ‘Akéda depuis le Mont Morya, il réfléchit et se dit : « Si mon fils était réellement mort, il aurait quitté ce monde sans enfants, car il ne s’est pas encore marié. Peut-être aurais-je dû le marier à la fille de ‘Aner, d’Echkol ou de Mamré (les 3 amis de Avraham) ? » C’est pourquoi, Hachem lui envoi l’information selon laquelle Rivka, la véritable compagne prédestinée à Its’hak (son Zivoug) est née.
Ceci est le sens des termes « Après cet événement », ce qui signifie, « après ces réflexions conséquentes à la ‘Akéda ».

Nous apprenons d’un enseignement de la Guémara Sotta (2a) :
« On n’unit un homme et une femme que selon leurs actes ».
Cela signifie que le mariage de chaque individu est fixé selon ses actes.
S’il est Tsaddik (juste), il méritera une femme Tsaddeket, et inversement.
Nos maîtres poursuivent leur enseignement et objectent sur le précédent :
« Pourtant, Rav Yéhouda enseigne au nom de Rav : 40 jours avant la conception du fœtus, une voix céleste retentit et déclare : « La fille d’untel est pour untel ! »
Comment pouvons-nous dire que le mariage dépend des actes de l’individu ?
C’est apparemment un décret du Très Haut avant même que l’homme ne vienne au monde !

Et la Guémara répond :
« Ici, il s’agit du premier mariage (premier Zivoug), et là, il s’agit du deuxième mariage (deuxième Zivoug) ».
Cela signifie que lors d’un premier mariage, le choix du conjoint est déterminé uniquement par décret d’Hachem sur chaque individu, mais lors d’un deuxième mariage, ce choix dépendra des actes de la personne.

Mais en réalité, nombreux de nos maîtres les commentateurs expliquent différemment. En effet, le mariage entre un homme et une femme ne représente pas seulement l’union entre deux personnes, deux entités physiques.
Il y a là une notion beaucoup plus profonde. Lorsqu’il est conçu dans le ventre de sa mère, l’individu a déjà son conjoint prédestiné, car ils sont en réalité deux parties d’une même entité intégrale. C’est ce qui est expliqué dans le Zohar Ha-Kadoch.
C’est pourquoi, avant même la conception du fœtus dans le ventre de sa mère, une voix céleste déclare déjà qui correspond à qui, qui constitue le complément à sa deuxième partie.

Selon cela, les couples unis par cette déclaration divine ne peuvent l’être que seulement s’ils se sont comportés tous les deux de la manière que l’on espérait d’eux, l’homme Tsaddik et la femme Tsaddeket, sans qu’aucun n’ait détérioré ses actes. Dans ces conditions, ils sont dignes de s’unir ensemble et de fonder un foyer fidèle au sein du peuple d’Israël.
Mais lorsque l’une des deux parties détériore ses actes, elle est catégoriquement susceptible de perdre le conjoint qui lui était destiné, car il est inconcevable qu’une femme Tsaddeket tombe dans les mains d’une homme Racha’ (impie) et inversement, comme il est dit (Téhilim 125-3) : « Car le sceptre de l’impiété ne se posera pas sur le patrimoine des justes … ».
Dans un tel cas, Hachem détourne donc les choses afin que la partie juste tombe sur un autre conjoint qui la méritera.

Ceci est donc le sens de « premier mariage » (premier Zivoug) et « deuxième mariage » (deuxième Zivoug).
Le « premier mariage » désigne le « conjoint originel », celui qui correspond le plus à la personne selon la racine de son âme. Alors que le « deuxième mariage » désigne le conjoint qui a été adapté à la personne lorsque ses actes ou ceux de son conjoint prédestiné n’étaient pas bons, et de ce fait, il faut marier la personne avec le conjoint qui lui correspond présentement.

A présent, nous pouvons nous pencher sur un point de notre Paracha ‘Hayé Sarah, qui mérite réflexion :

Si Avraham apprend la naissance de Rivka, et qu’on l’informe depuis le Ciel qu’elle est le Zivoug, la femme prédestinée à son fils Its’hak, pour quelle raison envoie-t-il son serviteur Eli’ezer en lui disant de se renseigner et de chercher une compagne pour son fils Its’hak ? Il pouvait parfaitement envoyer Eli’ezer immédiatement et lui dire explicitement : « Sache que Rivka fille de Bétouel est le Zivoug, la femme prédestinée à mon fils Its’hak. Va s’il te plait et prends la pour mon fils ! »

En réalité, Avraham savait que Rivka était effectivement la compagne prédestinée à Its’hak depuis la racine de son âme, et qu’ils étaient véritablement comme une seule âme, mais Its’hak avait eu le mérite de recevoir une bonne éducation spirituelle de ses parents, et il s’est élevé au point d’atteindre le niveau spirituel supérieur qu’il avait atteint. Alors que Rivka avait grandi parmi des gens Récha’im (impies), Bétouel et Lavan. Il était donc difficile d’espérer d’elle de préserver sa droiture spirituelle dans de telles conditions, et il était véritablement à craindre qu’elle ne soit pas Tsaddeket et qu’elle ne corresponde pas à Its’hak. C’est pourquoi, Avraham demanda à Eli’ezer qu’il aille vérifier les choses, et si Rivka a réellement préservé sa droiture spirituelle malgré l’environnement défavorable, elle est encore digne d’être la compagne de Its’hak.

Lorsque notre maître le Rav Ovadia YOSSEF z.ts.l était un jeune-homme de 24 ans, il cherchait un Chidou’h (une proposition de mariage), mais en ces temps (milieu des 40),
il n’y avait quasiment pas de jeunes-filles Séfarades qui étaient disposées à fonder un foyer avec un Avre’h qui étudie la Torah.
On lui proposa une jeune-fille qui était la fille d’un des Grands de la Génération (qui n’était déjà plus de ce monde), mais lorsqu’on en informa les frères de la jeune-fille, ceux-ci répondirent : « Nous avons déjà un gendre Avre’h, un seul ‘Ha’ham
(érudit dans la Torah) pour toute la famille c’est suffisant ! » Et ils repoussèrent ainsi le Chidou’h, sans savoir ce qu’ils étaient en train de perdre …

A ce moment-là, une autre jeune-fille du nom de Margalit PATAL z’’l cherchait elle aussi un Chidou’h. Son père (le Gaon Rabbi Avraham PATAL Ha-Lévy z.ts.l) faisait partie des Rabbanim de la communauté des originaires de la ville de Alep (Syrie) à Jérusalem. Elle était aussi une jeune fille dont on faisait l’éloge et que l’on glorifiait pour ses qualités spirituelles et humaines. De nombreux jeunes-hommes désiraient obtenir un Chidou’h avec elle, et parmi eux des gens issus de familles aisées et respectables. Mais elle repoussait toutes les propositions en disant : « Je cherche un jeune-homme qui s’adonne à l’étude de la Torah, qui soit Talmid ‘Ha’ham ! »

Le temps que les choses se fassent, le Gaon Rabbi Avraham PATAL alla trouver le Gaon Rabbi ‘Ezra ‘ATTIE ainsi que le Gaon Rabbi Ya’akov ‘ADESS les maîtres de notre maître le Rav z.ts.l (qui faisaient eux aussi partie des Rabbanim originaires de Alep), et il vérifia auprès d’eux des détails au sujets de notre maître le Rav z.ts.l. Rabbi ‘Ezra ‘ATTIE lui dit : « Si la Yéchiva de Porat Yossef (qui était dirigée par Rabbi ‘Ezra ‘ATTIE) n’a été fondée que pour en produire Rabbi Ovadia YOSSEF, cela nous aurait suffi !! »
Rabbi Ya’akov ‘ADESS lui dit à son tour : « Dépêche-toi de le prendre
(textuellement : « Attrape le ! »), car il n’a pas son pareil ! Il est déjà plus grand que nous ! Si tu réalises le Chidou’h, je viendrais moi-même chanter à la fête des fiançailles ! »

Et il en fut ainsi ! Ils se rencontrèrent et eurent le mérite de fonder leur foyer sur les socles de la Torah en des temps très difficiles. Ils accomplirent la Torah dans la pauvreté, et eurent plus tard le mérite de l’accomplir dans la richesse, d’élever une nouvelle génération dans laquelle des milliers de garçons et de filles ont placé tout leur désire, tout leur amour et tout leur destin uniquement dans l’étude de la Torah et l’accomplissement des Mitsvot.

Puissions-nous réaliser la volonté d’Hachem de manière conforme à Sa volonté, et que l’on ait le mérite d’être délivrés rapidement et pour l’éternité.

Chabbat Chalom