Commentaires rédigés par le Gaon Rabbi Zévadya Ha-COHEN Chlita,
chef de tous les Tribunaux rabbiniques de Tel Aviv, pour Halacha Yomit
Nous lirons ce Chabbat l’ordre donné par Hachem à Avraham :
« Va pour toi, quitte ta terre, ta patrie, la maison de ton père, vers la terre que je t’indiquerai ».
Avraham n’est pas jeune à ce moment précis.
Il a 75 ans lorsqu’il se dirige vers l’inconnu.
Et il n’est pas seul. Se joignent à lui son épouse Saraï (qui s’appellera plus tard Sarah), et son neveu Loth. Il emporte aussi avec lui tous ses biens, ainsi que « toutes les âmes qu’ils ont fait à ‘Haran » (toutes les personnes qu’ils ont convaincues de reconnaître Hachem comme seul et unique D.ieu), tout ceci « vers la terre que je t’indiquerai ».
La chose peut paraître étonnante :
Pourquoi ne pas indiquer à Avraham - dès le départ et de manière précise - le lieu de sa destination ? Il est tout de même extrêmement difficile à un homme d’abandonner définitivement son lieu de résidence régulier, sa ville natale, l’entourage dans lequel il se trouve et auquel il est habitué, pour en plus se diriger vers un endroit inconnu !
Il est évident que cela représente une très grande difficulté, en particulier du fait qu’il n’est pas seul, et qu’il est responsable de toutes les personnes qui l’accompagnent.
Pourquoi ne pas le soulager en lui révélant au moins sa destination et ce qui l’attend ?
Cette question a été posé dans le Yalkout Chim’oni (Midrach), et voici ce qu’il y est dit :
« Pourquoi ne lui a-t-il pas révélé ? Afin de la faire apprécier (la terre d’Israël) à ses yeux, et de lui donner une récompense pour chaque pas réalisé sur son sol. »
Cela signifie qu’il y a une différence énorme entre une épreuve dont l’homme connaît l’objectif exigé, et une épreuve dont l’homme ignore l’objectif que l’on attend de lui. Cette différence est comme la distance entre le ciel et la terre !
Et la taille de la récompense est égale à la taille de l’épreuve !
Il est évident qu’Hachem pouvait révéler dès le départ à Avraham sa destination, mais dans ce cas, l’épreuve aurait été relativement plus facile, et sa récompense diminuée.
Par contre, le fait qu’Avraham ignorait sa destination rendait l’épreuve davantage difficile, et sa récompense incommensurablement plus importante.
Effectivement, Avraham ne posa pas de questions, « Avraham alla comme lui a dit Hachem », et pour cela, il fut promis à Avraham : « Je ferais de toi un grand peuple et je te bénirai, j’agrandirai ton nom, et tu seras une bénédiction. Je bénirai ceux qui te béniront, ceux qui te maudiront je les maudirai, et les nations de la terre seront bénies à travers toi. »
Il n’est pas rare de vivre des situations de doutes lorsqu’on désire marcher dans les voies de la Torah et de la crainte de D.ieu, et l’on se heurte parfois à des difficultés ou à des dilemmes dans lesquels on doit prendre une décision, ou lorsqu’on ignore la finalité du processus, comme lorsqu’on a l’opportunité d’accepter un travail mais dans un lieu inapproprié aux valeurs de la Torah, où un lieu de scolarité pour les enfants ou autre.
Nous devons savoir que tout ceci n’est qu’une épreuve pour l’homme, et il se doit d’agir uniquement selon les exigences de la Torah en conformité parfaite avec la Halacha, même si la finalité de la chose ne lui apparaît pas clairement sur le moment.
Ceci s’inscrit dans le cadre de « vers la terre que je t’indiquerai ».
Si nous mettons en application (uniquement) « comme lui a dit Hachem », il nous est promis « la bénédiction ».
Cela nous apprend que ce que nous pensons n’est pas toujours ce que nous devons faire pour réussir, car la bénédiction se trouve exclusivement dans les mains d’Hachem.
On raconte qu’un Chamach (intendant) de synagogue était illettré.
Un jour, les notables de la communauté décidèrent qu’il faut dorénavant rédiger des rapports sur les activités de la synagogue, et que le Chamach doit donc apprendre à lire et à écrire. Le cas échéant, il sera congédié.
Le Chamach – qui n’était pas jeune – essaya d’apprendre mais il ne réussit pas.
Il fut donc forcé de quitter ses fonctions.
Quelques temps plus tard, il décida de tenter sa chance dans le commerce du bois.
La bénédiction fut au rendez-vous, il s’agrandit progressivement et il devint le plus important commerçant en bois de la région.
Un jour, il devait signer un important contrat avec le ministre des finances d’un pays. Lorsqu’ils signèrent le contrat, notre ex Chamach signa avec une croix.
Le ministre en fut choqué, et il lui demanda : « Comment est-ce possible ?! Vous êtes le plus important commerçant en bois, et vous ne savez ni lire ni écrire ??! »
Notre commerçant ex Chamach sourit et lui répondit : « Si je savais lire et écrire, je serais encore aujourd’hui Chamach d’une synagogue … »
Chabbat Chalom