Dvar Torah pour vendredi 11 Tammuz 5783 30 juin 2023

Divré Torah sur ‘Houkat et Balak

Par le Rav David A. PITOUN

‘Houkat

« Playlist de Mitsvot »

Contexte
Hashem ordonne à Moshé et à Aharon le commandement de Para Adouma – La vache rousse.

Cette Mitsva consiste à se procurer une vache totalement rousse, sans la moindre imperfection, et qui n’ai jamais porté de poids. On procédait à la Shé’hita – l’abatage rituel de cette vache, puis, elle était complètement brûlée. Les cendres de la vache étaient mélangées à de l’eau du Beit Ha-Mikdash (Temple), et toute personne ou objet ayant été au contact ou en présence d’un mort (juif) étaient aspergés de ce mélange, et retrouvaient leur statut de purs.

Ce qui fait du commandement de Para Adouma, une ‘Houka – une loi irrationnelle, c’est que justement, celui qui aspergeait les personnes ou objets afin de les rendre purs, devenait lui-même impur. Il devait lui-même suivre un nouveau processus de purification.

« Hashem parla à Moshé et à Aharon en ces termes: "Ceci est la ‘Houka (la loi irrationnelle) de la Torah … » (Bamidbar 19 – 2 début de ‘Houkat)

De nombreux commentateurs demandent :
Il aurait été plus précis de dire « Ceci est la ‘Houka de la vache… », ou bien « Ceci est la ‘Houka de la purification… ». Pourquoi généraliser l’aspect irrationnel de la Para Adouma (la vache rousse) à toute la Torah ? Il existe bien dans la Torah des commandements tout à fait rationnels, dont le sens est à la portée de chacun ?!

Lors de l’un de ses cours, notre maître, le Rav Ovadia YOSSEF z.ts.l a répondu à cette question de la façon suivante :
Il existe une catégorie d’individus qui se refusent à pratiquer toutes les obligations d’un juif. Ces gens prétextent qu’ils ne peuvent pratiquer que les choses dans lesquelles ils trouvent un sens. Par exemple, ces gens-là n’auront aucune difficulté à donner de la Tsedaka à un nécessiteux, ou bien, on pourra constater chez eux une véritable aversion pour tout ce qui est de nuire à son prochain … etc.… Ces gens-là pratiqueront aussi d’autres Mitsvot à la condition qu’il y ait une certaine « logique » à leurs yeux.

En contrepartie, il existe des personnes, dont la Emouna en Hashem et sa Torah, est inébranlable. Ceux-là n’ont pas besoin d’avoir recours à une démonstration intellectuelle quelle qu’elle soit pour pratiquer les Mitsvot. Ces Tsaddikim accomplissent tous les commandements de la Torah sans jamais être dérangés par le fait qu’il y a certains points qu’ils n’arrivent pas comprendre !

Il est écrit dans Tehilim (119) « Les Reshaïm (les impies) sont loin de la délivrance, car ils n’ont pas recherché tes ‘Houkim (lois irrationnelles) ».

Il existe plusieurs sortes de maladies. Certaines dont on connaît le mode guérison, et d’autres maladies dont on ignore le mode de guérison.

Le Tsaddik, qui lui, accomplit toutes les obligations d’un juif, même celles dont il ignore le sens, sera sauvé par Hashem de toutes les maladies, même de celles dont on ignore le mode de guérison, « Mida Kénegued Mida » – Mesure pour mesure.

Mais le Rasha (l’impie), qui lui, s’autorise à se faire une sélection – une « playliste » - des devoirs qu’il accomplit, ne se verra délivrer que des maladies dont on connaît le mode de guérison, et cela aussi selon le principe de « Mida Kénegued Mida – Mesure pour mesure.

Puisqu’ils n’ont pas recherché l’accomplissement des ‘Houkim, ces lois irrationnelles, sous prétexte que cela n’avait aucun sens à leurs yeux, les Réshaïm seront loin de la délivrance, en cas de maladie incurable !!!

Un peu de confiance en l’infinie sagesse de la Torah, un peu d’innocence dans la pratique des Mitsvot, mais surtout beaucoup d’humilité vis-à-vis d’Hashem, peuvent nous sauver la vie !!!!!

C’est pour cela que la Parasha qui traite de la loi irrationnelle de la Para Adouma (vache rousse) débute par les termes généraux « Ceci est la ‘Houka (la loi irrationnelle) de la Torah … », et non pas « Ceci est la ‘Houka de la vache… », ou bien « Ceci est la ‘Houka de la purification… ». Afin de nous enseigner qu’au même titre que nous accomplissons des devoirs de la Torah, parce qu’ils nous semblent contenir un sens logique, ainsi nous devons accomplir l’intégralité des devoirs de la Torah, même lorsqu’on a du mal à les comprendre !

Balak

« Moshé Rabbenou et Bil’am, c’était pourtant la même recette ?! »

Contexte
Israël se trouve maintenant devant le pays de Moav.
Balak, le roi de Moav redoute qu’Israël n’emporte une fois de plus la victoire, comme il l’a emportée devant les autres pays qui ont cherché à lui faire du mal. C’est pour cela qu’il décide, sur le conseil des princes de Midian, le pays voisin, de ne pas leur faire la guerre, mais d’employer plutôt un autre moyen pour les exterminer.
Il mande l’assistance de Bil’am, prophète non-juif, doté par Hashem de très grandes capacités prophétiques. Cependant, Bil’am est aussi un individu immoral et abject, aux moeurs dépravées (il pratiquait l’intimité conjugale avec son ânesse), et d’une très grande cupidité.
Balak lui demande de venir dans son pays, Moav, et d’attirer sur eux la malédiction d’Hashem. Après avoir consulté Hashem, Bil’am rejoint Balak avec l’avertissement d’Hashem que seules les paroles qu’Il lui mettra lui-même dans la bouche se réaliseront.
Bil’am tente plusieurs fois de prononcer des malédictions à l’égard d’Israël, en voulant chaque fois faire mention de leurs fautes, afin d’attirer sur eux la colère d’Hashem, mais à chaque fois qu’il ouvre la bouche, ce ne sont que des Béra’hot (des bénédictions) qui en sortent.
Après plusieurs tentatives sans succès, il décide de partir, mais avant, il donne un conseil au roi Balak : inciter Israël à la débauche, puisque c’est la pire des Averot (transgressions) aux yeux d’Hashem. Et c’est effectivement ce que Balak fait. Il envoie des filles de Midian, ainsi que sa propre fille, s’installer près du camp d’Israël, qui se laisse séduire, et la colère d’Hashem s’abat sur eux en provoquant la mort de 24 000 personnes.

Rashi écrit dans son commentaire sur notre Parasha :
« Comment Hashem laisse sa Shé’hina (présence divine) reposer sur un non-juif Rasha (impie) ?
Afin que les nations n’aient pas la possibilité de venir argumenter auprès d’Hashem : « Si tu nous avais donné à nous aussi un prophète, comme tu l’as fait avec Israël, nous serions revenus sur le droit chemin ! » Hashem leur a donné Bil’am, ce qui ne les a pas empêchés de mal se comporter ».

Question
Le prophète qui fut donné à Israël (Moshé Rabbenou) était à même de guider Israël vers le droit chemin, du fait de sa personnalité très saine, de sa grandeur, et de sa droiture. Israël pouvait s’inspirer de lui. Mais que pouvait inspirer Bil’am aux nations si ce n’est des moeurs dépravées, de la perversion, de la convoitise, de la méchanceté, etc … Les 2 « cadeaux » ne sont, à priori, pas équitables ?!

On rapporte au nom du Gaon et Tsaddik Rabbi ‘Haïm Its’hak ‘HAÏKIN z.ts.l, Rosh Yéshiva de « ‘Ha’hmé Tsarfat » Aix les Bains – France, l’explication suivante :

Il est écrit : « La crainte d’Hashem est sa grange (la grange de celui qui craint Hashem) ». (Isha’ya 33)
La Guémara Shabbat (30a) commente ce verset en disant que c’est selon la capacité que l’on donnera à la grange, que l’on pourra engranger la récolte de la Torah.
C’est comme cela que l’on explique une autre parole de nos maîtres sur un verset de Daniel :
« Il ne donne la sagesse qu’à celui qui possède en lui de la sagesse » (Daniel 2-21).
Hashem ne donne de la sagesse qu’à celui qui se dispose à la recevoir.

Ceci est comparable à une femme qui, après avoir goûté un plat chez sa voisine, lui demande la recette. La voisine lui indique avec précision, tous les ingrédients nécessaires, ainsi que les temps de cuisson. La femme, après avoir raté son plat, revient en colère en accusant sa voisine de lui avoir caché un ingrédient. Celle-ci, intriguée, lui assure de lui avoir tout indiqué, mais lui demande : « Avant d’avoir commencé à cuisiner, as-tu lavé les différents ustensiles ? » L’autre lui répond : « Non, effectivement je ne les ai pas lavés, mais j’ai suivi scrupuleusement toutes tes instructions. » La voisine lui répond : « C’est justement ça le problème ! Tes ustensiles sales ont gardé un mauvais goût qu’ils ont transmis à la nourriture que tu as cuisinée en eux ! »

De même, Bil’am a reçu les mêmes capacités que Moshé Rabbenou.
Cependant, Moshé Rabenou a d’abord apprêté sa personnalité à recevoir toute la Kédousha (sainteté) qui lui était donnée. Il a effectué un véritable travail de « nettoyage » de tous les traits de caractère pouvant faire obstacle à la Torah.
Ce qui n’est pas le cas de Bil’am, qui a gardé ses 3 défauts principaux :
Un oeil mauvais ; un esprit vaniteux ; une âme cupide (Avot chap.5 Mishna 19) 

Pas étonnant que son plat est raté !!!

Avant de pénétrer véritablement la Torah, il est impératif de nettoyer toute sa personnalité de tout défaut et imperfection, pouvant faire parasite et obstacle au message de la Torah.

Shabbat Shalom