Durant la période du ‘Omer, il est d’usage parmi le saint peuple d’Israël – et en particulier chez les Séfaradim et les originaires du Moyen-Orient – que les Rabbanim commentent les Pirké Avot entre Min’ha et ‘Arvit les jours de semaine à la synagogue. Tel était l’usage personnel de notre maître le Rav Ovadia YOSSEF z.ts.l. Chaque jour, il commentait les Pirké Avot durant une heure.
C’est aussi ce qu’il nous a indiqué de faire dans le cadre de la « Halacha Yomit », car même si la valeur de l’enseignement de la Halacha est incommensurable, malgré tout, nous avons le devoir d’écrire de manière ponctuelle des propos de morale, en particulier à travers les Pirké Avot.
Nous allons nous efforcer - avec l’aide d’Hachem – d’y joindre aussi des sujets de Halacha dans la pratique.
Aujourd’hui et demain, nous rapporterons des propos prononcés par notre maître le Rav z.ts.l durant la période du ‘Omer.
Il est enseigné dans les Pirké Avot :
רַבִּי יוֹסֵי אוֹמֵר, כָּל הַמְּכַבֵּד אֶת הַתּוֹרָה, גּוּפוֹ מְכֻבָּד עַל הַבְּרִיּוֹת. וְכָל הַמְּחַלֵּל אֶת הַתּוֹרָה, גּוּפוֹ מְחֻלָּל עַל הַבְּרִיוֹת. (פרק ד משנה ו)
Rabbi Yossé dit : Celui qui honore la Torah, son corps (sa personne) sera honoré par les gens. Celui qui profane la Torah, son corps sera profané par les gens. (Chap.4 Michna 6).
Rabbi Yossé était un descendant de Yéhonadav Ben Ré’hav (voir Méla’him II 10-15, 16), qui avait ordonné à sa descendance de ne jamais boire de vin (voir Yérmiyahou 35-1 à 19). Les descendants de Yéhonadav Ben Ré’hav – qui avaient un très grand respect pour lui – observèrent son ordonnance avec vigilance.
Le prophète Yérmiyahou prononça plusieurs prophéties élogieuses à leur égard, car ils étaient des gens Tsaddikim.
Nos maîtres attestent (à plusieurs endroits du Talmud) que Rabbi Yossé « apporte des raisons à tous ses propos ».
C’est-à-dire : Rabbi Yossé possédait une réflexion très droite, et de ce fait, il avait toujours de très forts arguments pour fonder ses décisions Halachiques.
C’est pourquoi, la Halacha est fixée selon son opinion, même lorsqu’elle diverge de celle de ses compagnons d’étude, qui étaient les grands maîtres de la Michna : Rabbi Chim’on (Bar Yo’haï), Rabbi Yéhouda, Rabbi Méïr (Ba’al Ha-Ness) et Rabbi El’azar Ben Chamoua’.
La halacha est toujours fixée selon l’opinion de Rabbi Yossé face à ses compagnons, du fait de sa grande sagesse.
Nos maîtres racontent (Yérouchalmi Kétoubot chap.11-3) :
Rabbi Yossé fut confronté à une grande détresse.
En effet, il n’eut pas le mérite d’épouser une femme très agréable. Elle le dédaignait particulièrement et lui rendait la vie très difficile. Rabbi Yossé désirait divorcer et épouser une nouvelle femme, mais il n’en avait pas les moyens, car lors de son mariage, il s’était engagé sur une très forte somme d’argent dans la Kétouba de son épouse (somme qu’il devait lui verser en cas de divorce), et il ne possédait pas cette somme.
Rabbi El’azar Ben ‘Azarya – qui était riche – vit la détresse de Rabbi Yossé, et se mobilisa pour l’aider. Il lui accorda un prêt d’un montant élevé, afin qu’il puisse payer la somme due à son épouse pour la divorcer, et recommencer une nouvelle vie.
Rabbi Yossé divorça de son épouse, et il épousa une nouvelle femme.
Son ex-femme épousa elle aussi un autre homme, qui était un nécessiteux et non-voyant de ses deux yeux.
Pour subvenir à leurs besoins, ce nécessiteux et sa nouvelle épouse – qui était l’ex-épouse de Rabbi Yossé – allaient dans les rues et récoltaient des dons en faisant du porte à porte, dans l’espoir qu’on leur donne quelques pièces.
Un jour, le mari désira entrer dans une rue habitée par des notables, mais son épouse refusa catégoriquement d’entrer dans cette rue.
Son mari lui en demanda la raison, et elle répondit :
« Mon ex-mari – Rabbi Yossé – habite dans cette rue, et je ne désire pas qu’il me voit dans cette situation de mendicité. »
Son mari se mit en colère contre son épouse et la frappa dans la rue.
Elle lui rendit les coups, et cela engendra une situation très humiliante.
A ce même moment, Rabbi Yossé se trouva à cet endroit, et il vit ce qui se passait.
Il se dit :
... וּמִבְּשָׂרְךָ לֹא תִתְעַלָּם. (ישעיהו נח-ז)
Ne te dérobe pas à ceux qui sont comme ta propre chair. (Yécha’yahou 58-7).
Il m’est interdit de me dérober à la détresse de mon ex-épouse ! Certes, nous ne sommes plus mariés ensemble, mais elle a quand même été mon épouse, une partie de moi-même, ma propre chair ! Comment puis-je me dérober à elle ?! »
Rabbi Yossé envoya des émissaires afin de nourrir son ex-épouse et son mari.
Chaque semaine, il leur envoyait véritablement toute leur subsistance, afin qu’ils vivent dignement, dans la paix et la quiétude.
Réfléchissons !
Il est question ici d’une femme qui a fait particulièrement souffrir Rabbi Yossé !
Elle le dénigra et le vexa ! Malgré tout, Rabbi Yossé ne l’abandonne pas ! Il continue à se soucier d’elle durant toute sa vie (elle quitta ce monde avant lui), afin qu’elle n’ait pas honte !
Celui qui porte atteinte aux Talmidé ‘Ha’hamim (érudits dans la Torah), finira par connaître lui-même l’humiliation.
C’est exactement ce que nous enseigne Rabbi Yossé dans les Pirké Avot cités initialement :
« Celui qui honore la Torah, son corps (sa personne) sera honoré par les gens. Celui qui profane la Torah, son corps sera profané par les gens. »
Que signifie « honorer la Torah » ? Il y a deux sens à cette phrase :
Le 1er sens : Honorer la Torah elle-même. Lorsqu’un Séfer Torah passe, chacun a le devoir de se lever, comme nos maîtres l’enseignent (Kiddouchin 33a) : « Si l’on se lève devant ceux qui l’étudient, à fortiori devant elle. » Il est une totale obligation de se lever lorsque passe une Séfer Torah.
De même, lorsqu’on est assis sur un banc, sur lequel se trouve un Séfer Torah, il est une totale obligation de se lever immédiatement.
Il en est de même si c’est un livre de Talmud ou tout autre livre sacré, si l’on est assis sur un banc et que l’on voit un tel livre saint posé sur le banc, il faut avoir la vigilance de se lever et de placer le livre à un endroit plus élevé.
Ceci est l’honneur envers la Torah. (Nous rapportons ici les propos personnels de notre maître le Rav z.ts.l, et il dit qu’il faut se montrer rigoureux sur ce point même envers des livres saints imprimés).
Le 2ème sens : Honorer les Talmidé ‘Ha’hamim, qui sont remplis de Torah.
Il faut les honorer, car ceci représente aussi l’honneur de la Torah, et « Celui qui honore la Torah, son corps (sa personne) sera honoré par les gens ».
Celui qui profane la Torah signifie celui qui ne montre pas d’honneur envers la Torah.
Notre maître le ‘Hafets ‘Haïm raconte :
Il y avait un homme qui possédait une très belle bibliothèque dans sa maison, pleine de livres saints. Cet homme avait des enfants en bas-âge, et il les mettait sur le « pot » face aux livres saints. Or, il est strictement interdit selon la Halacha d’agir ainsi, comme stipuler dans le Choul’han ‘Arou’h (ou même de changer un bébé dans une pièce où se trouvent des livres saints visibles, où face aux Nérot de Chabbat lorsqu’elles sont allumées).
Cet homme dédaigna les livres saints par son comportement.
Le ‘Hafets ‘Haïm termina en disant que peu de temps plus tard, cet homme mourut et son cadavre fut profané par les non-juifs !
Nous apprenons de là le degré de gravité de la chose, et combien devons-nous nous comporter avec respect envers les livres saints.
Au foyer de notre maître le Rav z.ts.l, la Rabbanit z’’l se comportait avec un immense respect envers les livres saints.
Un jour où des cambrioleurs s’étaient introduits dans les maisons voisines en présence des occupants, les enfants de notre maître le Rav z.ts.l eurent très peur.
La Rabbanit z’’l leur dit : « Avec une maison remplie de livres saints, vous n’avez rien à craindre ! ».