Nous sommes aujourd’hui le 16 Adar, date à laquelle les villes qui furent entourées de murailles au temps de Yéhochoua’ Bin Noun – dont Jérusalem - célèbrent la fête de Pourim cette année en partie, comme nous l’avons expliqué.
Il est dit dans la Méguilat Esther :
וַיֹּאמֶר הָמָן, לַמֶּלֶךְ אֲחַשְׁוֵרוֹשׁ--יֶשְׁנוֹ עַם-אֶחָד מְפֻזָּר וּמְפֹרָד בֵּין הָעַמִּים, בְּכֹל מְדִינוֹת מַלְכוּתֶךָ; וְדָתֵיהֶם שֹׁנוֹת מִכָּל-עָם, וְאֶת-דָּתֵי הַמֶּלֶךְ אֵינָם עֹשִׂים, וְלַמֶּלֶךְ אֵין-שֹׁוֶה, לְהַנִּיחָם. אִם-עַל-הַמֶּלֶךְ טוֹב, יִכָּתֵב לְאַבְּדָם; וַעֲשֶׂרֶת אֲלָפִים כִּכַּר-כֶּסֶף, אֶשְׁקוֹל עַל-יְדֵי עֹשֵׂי הַמְּלָאכָה, לְהָבִיא, אֶל-גִּנְזֵי הַמֶּלֶךְ.
(אסתר ג-ח, ט)
Haman dit au roi A’hachvéroch : Il y a un peuple, dispersé et désuni parmi les peuples, dans tous les pays de ton royaume, leur religion diffère de celle de tout autre peuple, ils ne pratiquent pas la religion du roi, et il n’est pas rentable au roi de les maintenir. S’il plait au roi, qu’il décrète de les anéantir, et je récolterais un fond de 10 000 Kikar d’argent par les artisans, pour alimenter les trésors royaux. (Esther 3-8, 9)
Cela signifie que lorsqu’Haman exprima devant le roi son désir d’anéantir tous les juifs, il sentit que la chose provoquerait une perte pour le trésor royal, car les juifs payaient des impôts au roi. C’est pour cela qu’il dit au roi qu’il était prêt à payer la somme de 10 000 Kikar d’argent au roi, en compensation de l’assassinat de tous les juifs.
Notre maître le Rav Ovadia YOSSEF z.ts.l pose la question suivante :
Quel lien y a-t-il entre la somme de 10 000 Kikar d’argent et les artisans, qui sont les ouvriers et les propriétaires d’usine de cette génération ?
Notre maître le Rav z.ts.l explique :
Haman – le père de Dalfon – n’était pas connu pour être particulièrement riche. Cependant, à cette époque, les artisans perses fabriquaient des vêtements pour le commerce dans la capitale royale de Chouchan (Suze). Ils fabriquaient également des tissus pour confectionner des vêtements. Mais les juifs – dans leur grande intelligence et leur grande sagesse – leur faisaient concurrence, et lorsque les juifs ouvraient des usines pour vêtements et tissus, de qualité supérieure et de couleurs flamboyantes, à des prix beaucoup plus bas, les clients se précipitaient chez les juifs, et les commerçants perses restaient au chômage, dans la détresse totale par manque de clients.
Que fit Haman ? Il exploita la chose à son profit.
Il alla trouver les artisans et les commerçants perses en leur disant :
« Donnez-moi un don unique pour les trésors du roi, et on décrètera l’anéantissement des juifs, du plus grand au plus petit, et ainsi, vous pourrez vendre votre marchandise de façon paisible, sans le moindre concurrent ! »
C’est ainsi qu’il leva une forte somme d’argent, allant jusqu’à 10 000 Kikar d’argent.
C’est pourquoi il dit au roi : « Je récolterais un fond de 10 000 Kikar d’argent par les artisans », afin qu’il ne lui demande pas : « D’où as-tu une telle somme pour payer le manque à gagner ? » C’est pour cela qu’il lui dit que cette somme lui avait été fournie par les artisans.
Qu’est-il écrit immédiatement après ?
וַיָּסַר הַמֶּלֶךְ אֶת-טַבַּעְתּוֹ, מֵעַל יָדוֹ; וַיִּתְּנָהּ, לְהָמָן בֶּן-הַמְּדָתָא הָאֲגָגִי--צֹרֵר הַיְּהוּדִים. וַיֹּאמֶר הַמֶּלֶךְ לְהָמָן, הַכֶּסֶף נָתוּן לָךְ; וְהָעָם, לַעֲשׂוֹת בּוֹ כַּטּוֹב בְּעֵינֶיךָ. (שם י, יא)
Le roi retira sa bague (son sceau) de sa main, il la donna à Haman fils de Hamédata descendant de Agag, l’oppresseur des juif. Le roi dit à Haman : L’argent t’est offert, ainsi que le peuple pour en faire ce qu’il te plaira. (Ibid. 10,11)
A partir de là, nos maîtres enseignent dans le Midrach Rabba qu’A’hachvéroch détestait les juifs encore plus que Haman l’impie, car avant même de recevoir quoi que ce soit de Haman, il lui confia son sceau royal, afin d’anéantir Israël.
Le Gaon Rabbi Yéhonathan EYWCHITS z.ts.l explique dans son livre Yé’arott Dévach la raison à la haine d’A’hachvéroch envers les juifs.
Les rois de l’antiquité étaient en général de nature curieuse sur le fait de savoir qui allait leur succéder sur le trône. A’hachvéroch questionna lui aussi ses astrologues à ce sujet. Ils lui répondirent que selon leurs visions, un juif siègera à sa place sur le trône. A’hachvéroch en fut très étonné. D’où pourrait venir un juif hériter de son trône ?! Car à ce moment-là, A’hachvéroch ignorait qu’Esther était juive et que ses enfants seraient juifs comme elle. C’est pourquoi, depuis ce jour, une véritable haine envers les juifs pénétra son cœur, car il pensa que les juifs allaient se révolter contre lui à la moitié de sa vie, qu’ils feraient une révolution et qu’ils s’empareraient de la royauté. C’est pour cette raison qu’une haine implacable envers les juifs brûla en lui. Et lorsque Haman lui présenta sa proposition, le roi fut rempli de joie, car le jour tant espéré était enfin arrivé, ce jour où il pourrait liquider les juifs, et ainsi mettre fin au danger de révolution.
Mais lorsque la reine Esther pénétra chez le roi et lui dit :
כִּי נִמְכַּרְנוּ אֲנִי וְעַמִּי, לְהַשְׁמִיד לַהֲרוֹג וּלְאַבֵּד ... (שם ז-ד)
Nous avons été – moi et mon peuple – vendus pour être anéantis, assassinés et perdus … (Ibid. 7-4)
A’hachvéroch compris qu’Esther était juive et que le juif qui allait hériter de son trône n’était autre que son propre fils Daryavech (Darius) né de son union avec Esther.
Ce n’est qu’à ce moment que l’esprit du roi retrouva le calme, que sa haine envers les juifs s’estompa, et qu’il retourna toute sa haine contre Haman en décrétant :
« Pendez-le !! »
לַיְּהוּדִים, הָיְתָה אוֹרָה וְשִׂמְחָה, וְשָׂשֹׂן, וִיקָר. (שם ח-טז)
Pour les juifs, ce fut la lumière, la joie, l’allégresse et le prestige (Ibid. 8-16)
Pourim Saméa’h !