Question : Y a-t-il une explication à l’usage d’ouvrir largement les mains lorsqu’on dit le verset :
פּוֹתֵחַ אֶת-יָדֶךָ; וּמַשְׂבִּיעַ לְכָל-חַי רָצוֹן. (תהלים קמה-טז)
« Potea’h Ete Yade’ha… » (« Tu ouvres la main et rassasies avec bienveillance tout être vivant. » Téhilim 145-16), qui se trouve dans le psaume « Achré Yochevé Bété’ha »), ou bien cet usage n’est pas juste ?
De même, doit-on se lever lorsqu’on dit la bénédiction de « Ichtaba’h » dans la prière du matin, ou bien est-il permis de rester assis ?
Réponse : Il est vrai qu’il n’est pas juste de suivre systématiquement tout usage adopté par la masse populaire, comme le fait de tourner la tête à droite puis à gauche lorsqu’on dit la phrase « Yamin Ou-Smol Tifrotsi… » (dans « Lé’ha Dodi »), ou d’autres exemples similaires, car ces usages n’ont pas tous été instaurés par des Talmidé ‘Ha’hamim (érudits en Torah) mais souvent par des ignorants qui ont par initiatives personnelles instauré des usages, qui se sont par la suite enracinés au sein du peuple.
A fortiori pour les personnes qui font toutes sortes de sauts ou de mouvements divers pendant la prière, ces usages ne sont absolument pas justes selon la Halacha.
Cependant, concernant l’usage d’ouvrir les mains lors du verset
פּוֹתֵחַ אֶת-יָדֶךָ; וּמַשְׂבִּיעַ לְכָל-חַי רָצוֹן.
(« Potea’h Ete Yade’ha… »), cet usage est celui des Séfaradim et des originaires des communautés du moyen orient, et il s’agit d’un usage très juste, qui est mentionné dans les enseignements de nos plus grands maîtres Séfarades, Rabbi ‘Haïm PALLAG’I, Rabbi Yossef ‘HAÏM auteur du Ben Ich ‘Haï et d’autres…
Le Gaon Rabbi Eli’ezer Yehouda WALLDINBERG z.ts.l soutient lui aussi cet usage dans son livre Chou’t Tsits Eli’ezer, car il représente une sorte de signe qui exprime la réception de l’abondance accordée par Hachem depuis le ciel. Similairement à ce que fit le prophète de l’idolâtrie Ba’al, Tsidkiya Ben Kena’ana lorsqu’il prit des cornes de fer en les montrant à Yéhochafate roi de Yéhouda, et en lui disant :
... בְּאֵלֶּה תְּנַגַּח אֶת-אֲרָם עַד-כַּלֹּתָם. (מלכים א' כב-יא)
« Avec ces cornes tu terrasseras Aram, au point de les anéantir. »
(Méla’him I 22-11).
Il ne fait aucun doute que ce prophète de l’idolâtrie s’inspira de véritables prophètes d’Hachem, car lorsqu’on réalise une chose afin de concrétiser une idée, le geste physique stimule également l’attention du cœur, puisque nous sommes convaincus que l’abondance provient totalement d’Hachem depuis le ciel.
Nous trouvons également cette façon de faire – sans comparaison - auprès de Moché Rabbenou au sujet duquel il est dit :
וְהָיָה, כַּאֲשֶׁר יָרִים מֹשֶׁה יָדוֹ--וְגָבַר יִשְׂרָאֵל; וְכַאֲשֶׁר יָנִיחַ יָדוֹ, וְגָבַר עֲמָלֵק. (שמות יז-יא)
« Or, tant que Moché tenait son bras levé, Israël avait le dessus; lorsqu'il le laissait fléchir, c'est Amalek qui l'emportait. » (Chémot 17-11)
Nos maîtres disent sur ce verset (Michna Roch Ha-Chana chap.3-8) :
Les bras de Moché dirigeaient-ils la guerre ?! En réalité, lorsqu’Israël levait les yeux vers le ciel, Israël gagnait la guerre, et lorsqu’il les baissait, il perdait la guerre.
Nous avons donc un comportement de Moché Rabbenou lui-même qui va dans ce sens, puisqu’il leva les bras vers le haut lors de sa prière devant Hachem, afin de stimuler aussi l’attention du cœur.
C’est à partir de là que le Gaon Rabbi Eli’ezer Yehouda WALLDINBERG z.ts.l apprend que l’ouverture des mains lors du verset « Potea’h Ete Yade’ha… ») est un remède pour obtenir une bonne Parnassa (subsistance matérielle), et il cite d’autres sources à cela, car la Parnassa est essentiellement tributaire de l’attention du cœur dans ce verset.
C’est pourquoi il est juste de tout faire afin de stimuler l’attention dans ce verset.
Par conséquent dans la pratique, il faut maintenir cet usage d’ouvrir nos mains vers le ciel lorsqu’on dit ce verset, et c’était également l’usage de notre grand maître le Rav Ovadia YOSSEF z.ts.l.
Le Gaon Rabbi Eli’ezer Yehouda WALLDINBERG z.ts.l a lui aussi adopté cet usage, même s’il ne faisait pas partie des usages de ses ancêtres.
Pour ce qui est de la deuxième question, faut-il se lever lors de la bénédiction de« Ichtaba’h », ou bien est-il permis de rester assis, ceci fait l’objet d’une Ma’hloket (divergence d’opinion Halachique) parmi les Richonim (décisionnaires de l’époque médiévale).
L’auteur du Hagahot Maïmoni écrit qu’il faut se lever durant toute la bénédiction de « Ichtaba’h ». MARAN cite ses propos dans le Beit Yossef (début du chap.53).
Cependant, selon l’opinion de l’ensemble des autres Richonim il n’y a d’obligation de se lever lors de la bénédiction de « Ichtaba’h » seulement pour l’officiant puisqu’il doit dire le Kaddich après avoir dit « Ichtaba’h », et c’est pourquoi il doit se lever, mais pour le reste de l’assemblée il n’y a absolument pas d’obligation de se lever.
Du point de vue de la Halacha, notre maître le RAMA tranche sur ce point selon l’opinion du Hagahot Maïmoni selon qui il faut se lever lors de la bénédiction de« Ichtaba’h ». Tel est l’usage des Achkénazim qui tranchent généralement selon le RAMA. C’est ainsi que tranche le Gaon Ya’bets dans son Siddour « Amoudé Chamaïm ».
Cependant, les Séfaradim et les originaires des communautés du moyen orient tranchent selon l’opinion des autres Richonim, Rav ‘Amram GAON, le SAMAK et d’autres…, et ne se lèvent pas lors de la bénédiction de « Ichtaba’h ».
Le Maguen Avraham écrit que c’est aussi ce qu’il faut déduire des propos de MARAN l’auteur du Choul’han ‘Arou’h.
En conclusion : Il faut avoir une concentration particulière lors du verset « Potea’h Ete Yade’ha… »), car l’essentiel de la Parnassa dépend de ce verset. Notre usage est d’ouvrir les mains et de les élever comme le ferait un homme qui désire recevoir une chose de son ami, ceci en signe sur la réception de l’abondance accordée par Hachem à chacun, et afin de stimuler l’attention du cœur.
Lorsqu’on dit la bénédiction de « Ichtaba’h », les Achkenazim ont l’usage de se lever, mais les Séfaradim n’ont pas cet usage, excepté pour l’officiant qui doit dire ensuite le Kaddich.